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dans leurs maisons. Je ne parle pas des Chinois, car ils n’en connaissent point l’usage ; plus le froid augmente, plus ils revêtent de plisses ouatées ou fourrées. Il n’a pas gelé cette année, et les résidents étrangers de Shanghai ont affrété un navire pour aller chercher de la glace au Kamtschatka.

Malgré l’encombrement et le tumulte des rues, nous allons, de temps à autre, nous promener dans la ville chinoise ; nous entrons dans les magasins et nous marchandons ces mille inutilités que le Céleste-Empire offre de toutes parts à la curiosité des étrangers. Nous parcourons la muraille crénelée qui entoure la ville ; nous visitons le puits aux enfants, où l’on jette ces petits malheureux ; et nous nous arrêtons au jardin de thé, tea garden, où les Chinois viennent prendre le thé, fumer l’opium et entendre de la musique. C’est leur lieu de divertissement ; c’est aussi l’endroit qui présente le plus de couleur locale. Une montagne factice avec des rochers entassés les uns sur les autres, une rivière en miniature avec des petits ponts en zigzag, des pavillons aux toits recourbés, forment le principal ornement de ce jardin, où les diseurs de bonne aventure, les saltimbanques, les histrions, ont élu domicile. Les Chinois, du reste, consacrent peu de temps à leurs plaisirs ; le négoce absorbe tous leurs instants, et à Shang-haï cette activité commerciale est encore excitée par la présence des étrangers. Ils servent en général d’intermédiaires entre les grandes maisons européennes ou américaines et les provinces de l’intérieur ; et ils vont faire sur les lieux de production des achats de thé et de soie.

Résidence des ambassadeurs français et anglais à Tien-tsin, en 1858. — Dessin de Doré d’après M. de Trévise.


Départ de l’Audacieuse pour le golfe de Péchéli. — Le cap Chantoung. — Bombardement et prise des forts de Ta-kou. — Le village de Ta-kou. — Pointe des amiraux sur le Tien-tsin. — Le cours du Pei-ho ; ses rivages. — Arrivée à Tien-tsin ; curiosité des habitants. — Établissement des quatre ambassades dans cette ville. — Le pont de marbre. — Les rues de Tien-tsin ; les magasins. — Caricatures chinoises contre les Européens. — Arrivée de nouveaux commissaires impériaux. — Leur entrevue avec l’ambassadeur de France. — Signature du traité de Tien-tsin. — Excursion à la Grande-Muraille de la Chine. — Singulier débarquement. — Cavaliers tartares. — Retour à Shang-haï.


Le mercredi 15 avril, à sept heures du matin, le commandant Vrignaud donne l’ordre d’appareiller, et par un temps humide et brumeux, nous mettons à la voile pour le golfe de Péchéli. Un sombre brouillard nous dérobe la vue de toute la terre, et les jaunes ondes du Yang-tzé-kiang disparaissent même a nos yeux. En sortant du fleuve, nous trouvons une mer tourmentée et une brise très-fraîche ; nous nous croyons encore sous la funeste influence du début de la traversée. Mais, le lendemain, la mer tombe, le temps se remet au beau, et nous filons sans fatigue neuf et dix nœuds à toute vapeur.

L’hydrographie de ces côtes est encore à faire ; les cartes sont défectueuses.

Au bout de quatre jours de traversée, par un soleil éclatant et par un froid superbe, nous doublons le cap Chan-toung ou cap Macartney, et nous entrons dans le golfe de Péchéli.

(Trois commissaires impériaux chinois annoncent leur arrivée et se déclarent prêts à écouter ce que les envoyés des nations de l’occident ont à proposer à l’Empereur. Les entrevues ne conduisent à aucun résultat sérieux. Les