LE PÔLE MEURTRIER[1]
II. — L’HIVERNAGE (fin)
ardi, 22 août. — Aujourd’hui, blizzard. Les rafales sont aussi
remarquables par leur soudaineté que par leur violence. D’un
seul coup, la vitesse de la brise a passé de 6 à 110 kilomètres à l’heure,
puis en moins d’une minute est retombée à 32 kilomètres. Une autre
fois elle a atteint 121 kilomètres. L’effet produit par ces coups de
vent sur la maison est très curieux. D’abord, aucun bruit, puis soudain
arrive une trombe si terrible que l’habitation tremble et semble
devoir être arrachée de ses fondations.
Mercredi, 23 août. — Hier soir, pour fêter le retour du soleil, on a débouché le champagne, porté des toasts à l’astre, source de lumière et de vie. Le temps par exemple n’a rien d’estival. Toute la journée, coups de vent terribles. Pendant plusieurs heures la vitesse de la brise s’élève à 112 kilomètres ; avec cela, neige très abondante : jamais encore je ne l’avais vue tomber aussi serrée.
Samedi, 26 août. — Avant le déjeuner, Ponting et moi faisons le tour des icebergs. Le plus proche de la rive s’est renversé. Du sommet de cet énorme glaçon, nous apercevons le soleil au-dessus des escarpements du cap Barne. Quelle douce impression nous produit sa radieuse lumière ! Comme des enfants, nous manifestons notre joie par des chants et des cris. Cela nous rappelle un clair matin de gelée en Angleterre : tout étincelle et l’air semble pétiller. Quelque intense que soit cette lumière, elle ne produit pas de chaleur, comme l’indique l’actinomètre enregistreur.
- ↑ Suite. Voyez pages 13, 25 et 37.