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travers l’étang de Caronte, et le canal de Port-de-Bouc à Arles. La profondeur d’eau sera de 2 mètres entre Arles et Port-de-Bouc, correspondant aux conditions normales de la navigation du Rhône en eaux moyennes. Elle sera de 3 mètres entre Port-de-Bouc et Marseille afin de faciliter le passage des petits bâtiments marins propres à la navigation dans l’étang de Berre. La largeur avait été basée, dans le projet, sur 50 mètres de cuvette dans le golfe de Marseille et les étangs, sur 17 mètres dans le souterrain, et sur 46 mètres entre Port-de-Bouc et Arles. Mais ces dimensions ont été réduites en raison des modifications de la batellerie du Rhône. Les transports se faisaient, il y a vingt ans, par des bateaux porteurs à vapeur, longs de 135 mètres et larges de 14, dont les machines restaient inutilisées et les équipages inoccupés pendant les délais de chargement et de déchargement. Ce système coûteux a été remplacé par des chalands de 60 mètres de long sur 8 de large dont les remorqueurs n’ont à subir aucune période de chômage.

Le canal de jonction dont les travaux, d’une durée de sept ou huit ans, sont évalués à la somme de 80 millions partagée entre l’État, le département des Bouches-du-Rhône, la ville et la chambre de commerce de Marseille, sera de la plus grande utilité pour notre grand port méditerranéen. Il mettra Marseille à 378 kilomètres de Lyon. On compte d’une ville à l’autre 351 kilomètres de voie ferrée ; mais le prix de revient du transport des marchandises par chemin de fer ressort à 0 fr. 04 la tonne au kilomètre ; par voie navigable, le fret tombera à 0 fr. 02 ou 0 fr. 015 ; d’où une diminution d’environ 8 francs la tonne pour le parcours total, équivalant à une augmentation de 200 kilomètres du réseau commercial de Marseille. Ce dernier port verra, en outre, disparaître la situation désavantageuse qui lui est faite vis-à-vis du port de Gênes par le percement du Simplon.

Le souterrain qui traverse le massif rocheux de Rove aura un développement d’environ 7 kilomètres et demi jusqu’à sa sortie à Marignane, dans l’étang de Bolmon. Au niveau de naissance, la largeur est de 22 mètres, comprenant 18 mètres pour le canal et 2 mètres de chaque côté pour les banquettes de halage. Il sera creusé à la cote 3 et la hauteur prévue est de 11 m. 40 sous clef. La voûte est à trois centres se rapprochant du plein cintre. Les travaux de forage ont actuellement atteint une longueur de 2 900 mètres. On travaille par trois galeries, deux aux naissances et une au faite ; on fait ensuite communiquer les galeries pour dégager la couronne, puis la voûte est construite par tronçons de 6 mètres et on déblaie le noyau central. Le transport des déblais est effectué par des locomotives à air comprimé dans le souterrain et par des locomotives à vapeur à l’extérieur jusqu’au déchargement. Ce travail prodigieux coûtera une cinquantaine de millions.

Succédant à la longue promenade du matin, cette visite du tunnel, véritable ruche bourdonnante, nous a mis en appétit. Notre satisfaction est grande de nous retrouver au calme devant une bouillabaisse fumante et toute dorée de safran dans la salle du restaurant Mistral d’où la vue s’étend, admirable, sur la ville, le port et la rade de Marseille.


(À suivre.) L. et Ch. de Fouchier.


À SAUSSET. LE RACCOMMODAGE DES FILETS (page 311).