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ses eaux et son nom. » À la vérité, le Rhône n’est pas toujours aussi tranquille et, dès que souffle le mistral, on tenterait vainement sur un frêle esquif une traversée que le courant rendrait très périlleuse ; un avis s’impose donc. Depuis Arles jusqu’à Saint-Louis du Rhône, sur un distance de plus de 10 lieues, on ne trouve pas un seul bac assurant le passage d’une rive à l’autre ; à Saint-Louis seulement existe un service officiel ; en deçà il n’y a donc lieu de s’engager qu’à bon escient et dans la journée pour une course du genre de la nôtre ; c’est dire qu’il faut être en mesure si l’on ne trouve aucun pêcheur de bonne volonté, de regagner à temps la voie ferrée qui conduit d’Arles aux Salines de Giraud. Si l’on descend jusqu’à la hauteur de Saint-Louis, point ou aboutit le chemin des Saintes-Maries par les étangs, il faut se garder de l’heure tardive ; à la nuit tombante le passeur, qui séjourne sur l’autre rive, devient systématiquement sourd et la nuit, toute une longue nuit dans ce site absolument désert, manquerait certes de charme.

FERRADE. ENFIN LE NŒUD TIENT BON (page 290).

Le Rhône traversé, le désert de la Crau s’étend aussi loin que portent les regards. On aura une impression suffisante de cette solitude en remontant pendant 3 kilomètres environ la route d’Arles pour regagner de là, à la station de Saint-Martin de Crau, la voie ferrée par le mas Trubert, le mas de Bezeaumes et le grand mas du Pilier ; c’est une course de moins de 4 lieues qu’il faut, d’ailleurs, quelque intrépidité pour entreprendre sous le chaud soleil de midi. Car il n’y a nul abri dans cette vaste plaine de 35 000 hectares et la réverbération solaire est intense sur les champs de cailloux qui la composent. Campus lapideus, disaient les Romains, pour désigner la Crau pierreuse. D’où provient cette profusion de pierres dont l’abondance est vraiment extraordinaire et qui forment comme une couverture régulièrement disposée ? On a émis l’opinion que la mer avait séjourné aux temps préhistoriques sur cette partie du sol de Provence et qu’en se retirant elle aurait abandonné tous ces galets. Il paraît plus plausible d’admettre qu’ils proviennent du cours impétueux d’un fleuve, Rhône ou Durance, et qu’ils ont été roulés à la suite d’inondations formidables sur la plaine de Crau entièrement recouverte.

FERRADE. NOUS AVONS VU DES BOUVILLONS N’ÊTRE MIS À TERRE QUE PAR QUATRE HOMMES RÉUNIS (page 290).

La légende ne pouvait manquer de s’emparer de cette bizarre configuration du sol et voici par quelle fable mythologique est expliquée l’origine de la Crau. « Après avoir délivré Prométhée de ses chaînes,