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attendre à une meilleure piste ; je voudrais seulement un peu de vent, pour nous aider ; il est vrai qu’il pourrait par contre nous éprouver fâcheusement, si la température ne s’élevait pas.

Lundi, 27 février. — La nuit dernière terriblement froide : 36°,1 sous zéro au moment où nous nous sommes levés ; le minimum a été −38°,3. À part quelques minutes de véritable souffrance causée par le froid aux pieds, tous nous avons bien dormi. Bientôt nous devrons augmenter les rations. Ce matin, couvert 13 kilomètres ; nous espérons en faire 9 cet après-midi. Ciel couvert et bonne piste jusqu’au moment où j’écris ; à ce moment, le soleil paraît de nouveau. Il est agréable de marcher de cairn en cairn, mais nombreux sont encore les sujets d’inquiétude.

Campement. Température : −34°,4. Encore un beau temps clair, très froid. Ce soir, calme plat. Une excellente étape : 22 kilom. 5 ; nous nous couchons beaucoup plus tôt que d’habitude. 57 kilomètres jusqu’au dépôt ; trois jours de combustible au plus, et six jours de vivres. Les choses commencent à prendre meilleure tournure ; à partir de demain soir, il sera possible d’augmenter légèrement les rations.

Mardi, 28 février. — La nuit dernière ; le thermomètre est descendu au-dessous de −40° ; malgré ce froid terrible nous avons bien dormi. Les rations seront un peu augmentées ; l’effet de cette décision est bon. Départ par 35°,5 sous zéro avec une légère brise de Nord-Ouest. Ce matin, pieds très froids ; il a fallu longtemps pour nous chausser, mais nous étions debout de bonne heure. Nous camperons plus tôt, pour courir la chance d’une bonne nuit. La position restera critique jusqu’au dépôt ; plus je réfléchis, plus je crains que, même ensuite, elle ne demeure très périlleuse.

Mercredi, 29 février. — Nuit froide. Minimum : −38°,6 ; au lever : −34°,4, avec vent de Nord-Ouest de la force 4. Au départ, effroyablement froid ; Bowers et Wilson portent leur dernière paire de mocassins neufs ; pour le moment, je garde mes vieux. Nous nous attendions à une étape très pénible ; la première heure l’est, en effet ; puis la piste s’améliore. Après une marche de cinq heures et demie, campé tout près d’un ancien site de grande halte. Température : −30°,2.

L’ancien camp le plus proche est notre dépôt, à 24 kilomètres dans le Sud ; cette distance, nous devrions la parcourir en un jour et demi au plus. Nous prions Dieu de nous accorder une seconde bonne étape. Le pétrole suffira jusque-là ; nous arriverons à cette cache avec trois jours de vivres dans le sac. L’augmentation de ration a produit des résultats extrêmement heureux.

Jeudi, 1er mars. — La nuit dernière très froide ; minimum : 40°,8 sous zéro. Au début de l’étape, froid intense, comme toujours. Départ à 8 heures. Marché jusqu’à ce que nous arrivions en vue du dépôt ; le pavillon se trouve à environ 5 kilomètres de la cache. Étape précédente : 20 kilomètres. Le halage, hier pénible, devient aujourd’hui éreintant. Temps merveilleux. Des jours et des nuits sans nuages, avec faible brise. Par malheur, venant du Nord, elle nous transperce. Pendant le déjeuner, soleil relativement chaud. Tous nos effets sont aussitôt mis au sec.


(À suivre.) Adapté par M. Charles Rabot.


LES CHAUSSURES DE SCOTT.