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agrandies à diverses reprises, notamment en 1491 et en 1591. En 1656, Louis XIII autorisa la ville à vendre les places, boulevards, fossés, bastions, pour en employer le produit à amener l’eau potable dans la ville. Seule resta la porte Mordelaise, flanquée de deux tours à mâchicoulis, comme l’exemple de ce que fut à Rennes l’architecture militaire du xve siècle. Puisque je suis là, à l’endroit où pénétraient les cortèges des ducs et des évêques, au milieu de la foule entassée dans les étroites rues voisines, je cherche les dernières vieilles maisons. Non loin, l’hôtel du Molan que fit construire le jurisconsulte Pierre Hévin, l’hôtel Montboucher où expira La Chalotais, l’hôtel Cuillé où s’abrita le Parlement à l’époque de ses démêlés avec l’autorité royale. Et çà et là, à travers les rues de la ville, d’anciennes habitations épargnées par le feu de 1720 : place Sainte-Anne, rue Saint-Michel, rue du Champ-Jaquet, place Saint-Melaine, promenade du Thabard où se dresse la statue de Du Guesclin. La Préfecture est logée dans l’ancien hôtel Le Cornulier, et la caserne Saint-Georges dans une ancienne abbaye de 1018, reconstruite en 1670 par Mme de la Fayette.

Le Palais de Justice a été construit sur les plans de Jacques Debrosse, la première pierre posée en 1618, l’achèvement vers 1670. C’est un beau quadrilatère à façade de style toscan, au perron gardé par les statues des jurisconsultes d’Argentré, La Chalotais, Toullier et Gerbier. À l’intérieur, profusion de boiseries sculptées et dorées dans la salle des Procureurs, dans la grand’chambre du Parlement décorée par Coypel. C’est un beau chapitre de l’histoire de Rennes, grave et luxueux, austère et fleuri.

LA VIERGE. STATUETTE DE BOIS, MUSÉE DE RENNES.

Le Palais Universitaire, moderne, construit de 1849 à 1855, abrite, avec les Facultés, le Musée. L’art des Flandres y est représenté par Téniers, Brauwer, Jordaens, Huysmans, Snyders, Van der Meulen ; l’art français par Poussin, Claude Lorrain, Chardin, Coypel. Quelques œuvres de haut vol : un Baptême du Christ et un Persée, de Véronèse, un Massacre des Innocents, de Tintoret, une Chasse aux Lions de Rubens, un Christ, de Van Dyck. La sculpture va de Coysevox à Rodin. Puis, en abondance, des collections de dessins et de gravures, toute une salle de dessins, environ cinq cents, provenant de la collection du marquis de Robbien. Et des galeries d’archéologie, de géologie, d’histoire naturelle, de monnaies, de faïences, de grand intérêt. Le Musée de Rennes vaut, en dehors des peintures et des sculptures, par ses faïences locales, par la collection iconographique relative à la Bretagne, par la réunion d’objets d’art provenant des confiscations faites pendant la Révolution dans les châteaux de nobles émigrés : on sait qu’un décret de Pluviôse an II avait attribué à diverses municipalités des grandes villes les richesses de cette provenance, et ce fut l’origine de nombre de musées et de bibliothèques. Des municipalités ne virent là d’abord qu’une charge, et sur certains points l’autorité administrative dut intervenir pour forcer l’organisation de ces expositions. À Rennes, le musée fut promené çà et là avant d’être fixé au Palais Universitaire : d’abord dans les bâtiments de la Visitation, puis aux Carmélites, dans les cellules de Saint-Melaine, à l’Évêché. Des tableaux furent attribués aux églises ainsi qu’à la décoration d’appartements de fonctionnaires, d’autres réclamés par les alliés comme provenant de pays conquis. En 1819, les collections furent transportées dans une chapelle annexe du collège des Jésuites, et de 1836 à 1855, avant de trouver leur installation définitive, elles habitèrent l’Hôtel de Ville.

SAINT-LAURENT. STATUETTE DE FAÏENCE, MUSÉE DE RENNES.

Les églises sont nombreuses à Rennes : la Cathédrale, bâtie de 1787 à 1844, avec ses deux tours de 40 mètres, formées de colonnes superposées ; Saint-Melaine, le plus ancien des édifices religieux de la ville, — certaines parties datent de 1032 ; — Saint-Étienne, du xiie siècle, où brille une verrière de Claudius Lavergne ; Saint-Aubin, très récent, avec un portail du xve siècle ; Saint-Germain, de la fin du xie siècle, où dort de son dernier sommeil Bertrand d’Argentré, sénéchal de Rennes ; la Toussaint, du xive siècle, mais qui fut reconstruite