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THÉÂTRE DE LA RÉVOLUTION

me remettez pas ? Moi, je vous connais bien. Je vous ai vu tout enfant, à Boudry.

MARAT.

Tu es Hulin, Augustin Hulin ?

HULIN.

Vous y êtes.

MARAT.

Que fais-tu ici ? Tu étais horloger à Genève.

HULIN.

J’étais tranquille, là-bas. Mais je comptais sans mon frère, un drôle, qui s’est lancé dans des spéculations, de louches entreprises, où il a engagé sa signature. Naturellement, il s’est avisé de mourir ensuite, laissant sa femme et un enfant de trois ans sans ressources. J’ai vendu ma boutique pour les tirer d’affaire ; et je suis venu à Paris, où je suis entré au service du marquis de Vintimille.

MARAT.

Je ne m’étonne plus de tes lâches paroles. Tu es un domestique.

HULIN.

Et quel mal y a-t-il ?

MARAT.

N’as-tu pas honte de servir un homme comme toi ?

HULIN.

Il n’y a aucune honte à cela. Nous servons tous, chacun à notre manière. N’êtes-vous pas médecin, monsieur Marat ? Vous passez vos journées à examiner des plaies, à les panser de votre mieux. Vous vous couchez fort tard, vous vous levez dans la nuit à l’appel de vos clients. N’est-ce point là servir ?

MARAT.

Je ne sers point un maître, je sers l’humanité. Mais toi, tu t’es fait le valet d’un homme corrompu, d’un misérable aristocrate.