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LES LOUPS

taires ; mais puisqu’une imputation précise est dirigée contre toi, il importe que tu y répondes.

VERRAT.

Jamais ! Jamais je ne m’abaisserai à me disculper de cet infâme outrage. J’en laverai tout à l’heure la bave dans le sang de ce traître. Mais parler avec lui, discuter, non, ce n’est pas mon affaire. Je ne suis pas comme lui un cracheur de phrases, un hâbleur de salons, un conférencier d’aristocrates. Je ne parle point, j’agis. Que ceux qui m’accusent retroussent leurs manches et me suivent dans cette cour ! Voilà la réponse que je leur ferai.

Il brandit son sabre nu, et en frappe violemment la table.
TEULIER.

Je te suivrai. Verrat ; je jette volontiers ma vie dans la querelle. Mais avant la réparation que je te dois, tu en dois une à la justice. La justice est la première offensée, tu lui dois le respect. Rentre ce sabre factieux, et réponds à ses questions, comme le plus humble de ses sujets.

VERRAT, se mord les doigts avec fureur.

Entendez-vous le jésuite, comme le miel et le fiel lui suintent de la bouche ! Son amer a crevé. — Je ne lui répondrai pas. Que ceux qui doutent de moi, aillent interroger les rives des deux fleuves et leurs eaux grasses de morts ! Que dans le silence dédaigneux de ma bouche, mes blessures parlent pour moi, — Il ouvre en les déchirant, sa redingote et sa chemise. — ma poitrine rouge de mon sang et de celui de l’ennemi, (je ne les distingue plus),… ma peau fumée par la poudre, mes poils grillés par le feu, mes habits éventrés, déchiquetés par les sabres !… Je sais ce que je vaux, et je le dis comme je le sais. La modestie est une vertu d’imbéciles et de filles bossues… Citoyens, je vous somme de déclarer que j’ai bien mérité de la patrie !

Les officiers l’acclament.
TEULIER.

Cette façon de discuter est intolérable. Laisse donc le souvenir des services que tu rendis à la patrie. Nous tous,