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THÉÂTRE DE LA RÉVOLUTION

vont droit au plaisir, sans chercher à se mentir à elles-mêmes, à couvrir leurs instincts du manteau de la raison. Mais je hais l’hypocrisie de l’intelligence, l’idiotie sanguinaire de ces idéalistes, ces dictateurs de l’impuissance, qui nomment corruption la franchise des besoins légitimes et feignent de nier la nature, pour assouvir, sous le nom de vertu, leur monstrueux orgueil et leur fureur de destruction. Oh ! être une brute, une bonne et franche brute, qui ne demande qu’à aimer les autres, pourvu qu’ils lui laissent une place au soleil !

CAMILLE.

Oui, nous sommes rongés par l’hypocrisie.

DANTON.

La plus odieuse des hypocrisies. L’hypocrisie du poignard. La guillotine vertueuse !

PHILIPPEAUX.

Nous avons détruit Capet, et c’est pour que Tallien, Fouché, Collot d’Herbois, rétablissent les dragonnades à Bordeaux et à Lyon !

CAMILLE.

Ces maniaques ont fondé une religion nouvelle, laïque et obligatoire, qui permet aux proconsuls de pendre, de tailler, de brûler, par vertu.

DANTON.

Il n’est pas de danger pareil dans un État à celui des hommes à principes. Ils ne cherchent pas à faire le bien, mais à avoir raison ; nulle souffrance ne les touche. La seule morale pour eux, la seule politique, est d’imposer leurs idées.

HÉRAULT, récitant d’un ton gouailleur.

Un honnête homme a bien d’autres désirs !
Il n’est heureux qu’en donnant des plaisirs…

LUCILE, rentrant, saisissant les derniers mots, et continuant la citation, à l’étourdie.

Un aumônier n’est pas si difficile.
Il va piquant sa monture indocile,