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THÉÂTRE DE LA RÉVOLUTION

CAMILLE.

Qu’as-tu, Lucile ? C’est notre ami, c’est Maximilien.

ROBESPIERRE, la salue en souriant.

Vous ne me reconnaissez pas ?

LUCILE, encore tremblante.

Ah ! vous m’avez fait peur !

ROBESPIERRE.

Pardon.

CAMILLE.

Comme tu trembles !

LUCILE.

J’ai froid. Adieu, Camille. Je n’en puis plus. Je vais dormir.

Camille lui sourit et lui envoie un baiser. Robespierre s’incline. Elle se retire sans être encore remise de son émotion, et en les saluant seulement d’un signe de tête.
L’aurore est venue, le ciel s’est coloré derrière la Bastille. — Au milieu des cris lointains, s’élève le crépitement des premières fusillades.
ROBESPIERRE, se tournant du côté d’où vient le bruit.

Allons ! Il ne s’agit plus d’amour aujourd’hui.

Il sort.
CAMILLE descend de la barricade.

Il ne s’agit plus d’amour ?… Et de quoi s’agit-il ? N’est-ce pas l’amour qui fermente dans cette ville, qui gonfle ces poitrines, qui offre au sacrifice ces larges moissons humaines ?… Ô mon amour, tu n’es pas égoïste et étroit, tu m’attaches à ces hommes par des liens plus forts. Tu es tout. Tu embrasses le monde. Ce n’est pas seulement ma Lucile que j’aime. C’est l’univers. À travers ses chers yeux, j’aime tous ceux qui aiment, qui souffrent, qui sont heureux, tout ce qui vit et meurt. J’aime ! Je sens que la flamme qui est en moi fait bouil-