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LXVIII.


L’ETRE NE PEUT AVOIR ÉTÉ CRÉÉ.


Mais pour mieux éclaircir la vérité de ces choses et faire d’autant plus clairement voir que la matière est d’elle-même, qu’elle a d’elle-même son mouvement, et qu’elle est véritablement la première cause de toutes choses, commençons par un principe, qui soit si clair et si évident, que personne ne puisse le révoquer en doute : le voici ce principe. Nous voïons clairement qu’il y a un monde, c’est-à-dire un ciel, une terre et une infinité de choses, qui sont comme renfermées entre le ciel et la terre ; c’est de quoi personne ne peut raisonnablement douter, à moins que de vouloir expressément faire le Pyrronien et vouloir généralement douter de toutes choses ; ce qui seroit vouloir fermer les yeux à toutes les lumières de la Raison humaine et vouloir s’oposer entièrement à tous les sentimens de la Nature. Si quelqu’un étoit capable d’en venir-là, il faudroit qu’il eut perdu le jugement, et s’il vouloit absolument persister dans de tels sentimens, il seroit plus à propos de le regarder comme fou, que d’emploïer inutilement des raisons pour l’instruire. Mais je crois qu’il n’y a aucun Pyrronien, si fou qu’il puisse être, qui ne sache, qui ne sente et qui ne soit même bien persuadé, qu’il y a au moins quelque différence entre le plaisir et la douleur, entre le bien et le mal, comme aussi entre un bon morceau de pain, qu’il mangeroit d’une main et un cail-