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ils dominent. Néanmoins, après qu’il s’en est servi comme des verges de sa fureur, il les jette au feu, comme il est marqé en la vie de S. Antonin au 2. de Mai. Antonin le débonnaire, Empereur, disoit qu’il aimoit mieux sauver la vie à un de ses sujets, que de tuer mille de ses Ennemis. Le Roi Louis XIV n’étoit pas de cette humeur-là, car il auroit certainement mieux aimé sacrifier mille de ses sujèts, que de pardonner à un seul de ses Ennemis.

Le bien de l’État, dit le Cardinal de Richelieu, est le but que Dieu lui-même a proposé à tous les Rois en leur mettant la couronne sur la tête ; il n’est rien qui leur doive être plus considérable ; c’est le centre où doivent tendre toutes leurs actions. L’Empereur Trajan, donnant l’épée au grand prêvot de l’Empire, lui dit ces belles et mémorables paroles, dignes de la grandeur et de la générosité d’un grand Prince ; tandis que je ferai justice, lui dit-il, emploïe ce glaive à la manutention de mon autorité, et si je deviens tyran dégaine le contre moi. C’est une inhumanité, dit Mentor à Télémaque, c’est une inhumanité, que d’arracher des mains des peuples, par des desseins pleins de fastes et d’ambition, les doux fruits de la terre, qu’ils ne tiennent que de la libéralité de la nature et de la sueur de leur front. La nature seule tireroit de son sein fécond tout ce qu’il faudroit, pour un nombre infini d’hommes modérés et laborieux ; mais c’est l’orgueil el la mollesse de certains hommes, qui en mettent tant d’autres dans un affreuse misère et pauvreté. Les Princes avides sans prèvoïance, qui chargent d’impôts ceux d’entre leurs sujèts, qui sont