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ne sont pas faits pour les Princes, mais les Princes sont faits pour les peuples, et peuvent à bon droit être apellés serviteurs du Public. Il y a eu au monde des peuples, avant qu’il y ait eu des Princes. Le devoir du Prince est d’acquérir au peuple du repos par son travail et de la sureté par ses périls, et faire par sa vigilance que ses sujets dorment en sûreté ; bref, il s’est, dit-il, ôté à lui-même, quand il s’est donné à la République. Ils doivent aimer leurs sujèts, comme des Pères doivent aimer leurs enfans ; mais un tiran fait tout le contraire, il traite ses sujèts en esclaves. Un bon Roi se fait aimer, un tiran se fait craindre ; un bon Roi s’expose pour le salut de son peuple, mais un tyran sacrifie tous ses peuples à son orgueil, à son ambition, à sa vengeance ; ôter à de pauvres peuples toutes les douceurs de la vie, leur arracher des mains le pain qu’ils font venir avec tant de peine et de travail, les rendre misérables et malheureux dans la vie, et les faire gémir dans leurs misères, cela est bien cruel et odieux ; cela est bien indigne de la qualité et de la dignité des Rois et des Princes, et cela devroit bien faire partout leur honte, leur confusion, et leur condamnation. Le bon Roi s’assujettit aux loix, mais le Tyran veut que tout lui soit permis. Alexandre et Cœsar, qui furent les deux plus grands Princes et Empereurs, dont il est parlé dans l’Histoire, ne furent que deux boute-feux, ou deux torrcns à ravager le monde par divers endroits, quisque suum populatus iter. Dieu, dit un Auteur, se sert des méchans Princes comme de bourreaux et de satellites, pour punir les Provinces et les Royaumes auxquels