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se plaindre et représenter leur pauvreté et leur misère, on n’y a point d’égards, on ne les écoute seulement point, ou si on les écoutoit, ce seroit plutôt à l’exemple du Roi Roboam, pour les surcharger que pour les soulager. Ce Roi, comme on sait, voïant que ses peuples se plaignoient des tailles et des impôts, dont son père le Roi Salomon les avoit chargés, qu’ils lui en demandoient la diminution, il leur fit cette fière et insolente réponse : mon petit doigt, leur dit-il, est plus gros que le dos de mon père, si mon père vous a chargés de tailles et d’impôts, je vous en chargerai encore plus ; mon père vous a fouettés avec des verges, et moi, leur dit-il, je vous fouetterai avec des scorpions. Voilà la réponse ; qu’il leur fit :[1] minimus digitus meus grossior est dorso patris mei… Pater meus coecidit vos flagellis, ego autem coedam vos scorpionibus. Les plaintes des pauvres peuples ne seroient maintenant guères plus favorablement écoutées, qu’elles ne le furent en ce tems-là : car la maxime des Princes souverains et de leur premiers Ministres est d’épuiser les peuples et de les rendre gueux et misérables[2], afin de les rendre plus soumis et les mettre hors d’état de pouvoir entreprendre aucune chose contre leur autorité. C’est une maxime à eux de permettre que les Financiers et Receveurs des Tailles s’enrichissent aux dépends des peuples, afin de les dépouiller puis après et s’en servir comme d’éponges, que l’on presse après les avoir laissé emplir. C’est une maxime à eux d’abaisser les Grands de leur

  1. 3 Reg. 12 : 10
  2. Card. de Richelieu.