Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 1, 1864.pdf/35

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sacrés et dictés à leurs auteurs par le Dieu des Juifs anciens et modernes. Mais, l’impulsion une fois donnée, la vérité ne manqua pas de se faire jour jusques dans les cervelles des esclaves de la doctrine synodale de Dordrecht. Deux théologiens éminents se hasardèrent enfin à apposer aux travaux des critiques allemands le sceau de leur autorité hollandaise ; ce furent les professeurs Scholten et Kuenen de l’université de Leide, qui par leurs écrits et leurs cours de théologie transplantèrent chez nous cette nouvelle école, qui en fait de progrès a dévancé et totalement éclipsé l’ancienne école de théologie libérale, dite de Groningue, fondée par le professeur Hofstede de Groot. Mais ce qui contribua au réveil de notre église protestante, plus même ou plus radicalement du moins que l’amour renaissant de la vérité des susdits professeurs, ce fut l’étroite orthodoxie de la faculté théologique à l’université d’Utrecht, qui, incapable de gagner la sympathie des jeunes gens qui suivaient les cours de professeurs conservateurs, négligeant complètement de fixer l’attention des élèves sur les travaux des hommes du progrès, devint pour ceux-ci un puissant stimulant pour s’adonner à l’étude des critiques avancés, et pour les juger sans préjugé, libres du joug spirituel d’aucune autorité telle que celle que les savants professeurs de l’université de Leide, imposaient involontairement à l’intelligence des étudians dont ils guidaient les études. Ajoutons à ces influences directes le développement de l’esprit des laïques par la lecture de la Revue de Dageraad et de pareils écrits, développement qui comblait de plus en plus la distance intellectuelle entre les ministres de la foi et les croyants, affaiblissait par-là journellement l’autorité et l’influence des premiers, et les poussait à se mettre à la tête du courant, afin de ne pas être brisés comme des digues impuissantes, et afin de conserver leur raison d’être et leur gagne-pain qui en dépendait. Malheureusement ce réveil, qui se manifeste en Hollande depuis quelques années seulement, est celui d’un peuple libre, il est vrai, mais d’un peuple flegmatique et calculateur, après un sommeil tranquille — mais assez lourd.