Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 1, 1864.pdf/123

Cette page a été validée par deux contributeurs.

comme au feu, au soleil, à la lune, aux étoiles, aux pierres, au bois etc., et de toutes ces vaines opinions-là le Sr. de Montagne n’en trouvoit pas, disoit-il, de plus folle et de plus ridicule, que celle qui attribue la divinité à l’homme ; par quoi, disoit-il, de faire de nous des dieux comme l’ancienneté a fait[1] ; cela surpasse l’extrême foiblesse de discours. J’eusse, disoit-il, encore plutôt suivi ceux, qui adoroient le serpent, le chien et le bœuf : d’autant que leur nature et leur être nous est moins connu, et avons plus de loi d’imaginer ce qu’il nous plait de ces bêtes-là et leur attribuer des facultés extraordinaires. Mais d’avoir fait des dieux, dit-il, de notre chétive condition de laquelle nous devons connoître l’imperfection, leur avoir attribué le désir, la colère, les vengeances, les mariages, les générations et les parenteles, l’amour et la jalousie, nos membres et nos os, nos fièvres, nos plaisirs, nos morts et nos sépultures, comme aussi d’avoir attribué la divinité non-seulement à la foi, à la vertu, à l’honneur, à la paix, à la concorde, à la liberté etc., mais aussi à la volupté, fraude, mort, envie, vieillesse, misère, à la peur, à la fièvre, à la malfortune et autres misères de notre vie frêle et caduque, il faut, dit-il, que cela soit parti d’une merveilleuse yvresse de l’entendement humain.

C’est de quoi Agesilaus, surnommé le grand, roi de Thessalie se moquoit assez plaisamment, car les Thessaliens lui étant venu dire un jour qu’en reconnoissance des bienfaits qu’ils avoient reçus de lui, ils l’a-

  1. Essai de Montagne, pag. 484.