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REVUE DES ECRIVAINS DAUPHINOIS 27 elle se promène parfois, seule dans la campagne, elle se retourne encore, sondant du regard les buissons fleuris des sentiers, prê tant une oreille attentive aux plus légers bruits. Chants d'oiseaux, bruissements de feuilles mortes, rien ne lui échappe. Parfois, un cavalier ralentit sa monture, sous prétexte de lui demander sa route... Elle répond un peu embarrassée, non sans rougir, car le regard du gentil cavalier s'est rencontré avec le sien, son cœur a battu plus vite, elle a eu un peu de frayeur, et c'est le front penché qu'elle rentre distraite au logis. Puis, le soir, lorsqu'enfin le sommeil est venu, elle revoit le sentier, les buissons; elle entend le chant des oiseaux et... peut- être aussi la voix du cavalier de tantôt... Réséda vient de te raconter une histoire. A toi, cher ami, de lui expliquer pourquoi elle a toujours peur et pourquoi elle voudrait encore rencontrer celui qui a été l'objet de sa frayeur. Marie RÉSÉDA. LE BAISER DE LA RELIGIEUSE NOUVELLE Par Emile TROLLIET (suite. ) Je lui administrai alors les suprêmes sacrements, persuadé qu'il y était suffisamment préparé par son double sacrifice : celui de patriote qui avait immolé à sa patrie les joies d'un amour par tagé, celui de l'amant qui venait d'immoler à la vertu et à Dieu son plus doux espoir. Il n'avait pas fait un acte de foi formel, mais son âme qui avait péché, n'était-elle pas purifiée et comme sanctifiée par ses actes d'héroïsme ? Ce n'était plus le pécheur que j'avais devant moi, c'était le jeune homme qui avait triomphé de la plus puissante tendresse, c'était le soldat, qui, pour son pays, avait offert sa poitrine aux meurtrières blessures. Car vraiment, c'était beau, ce qu'il avait fait là : quitter une femme tant aimée pour courir aux dangers, à la mort, à l'éternelle absence! Aussi, plus j'y pensais, et plus je l'admirais. Mais en même temps que j'étais plein d'admiration pour ce dévouement stoïque et sublime, j'étais plein de pitié pour cette mort solitaire, loin de tout regard aimant, loin de l'être chéri. Oh ! comme j'aurais voulu trouver quelque chose qui, sans violer la morale humaine et divine, pût récompenser le dévouement et adoucir cette solitude ! Cette belle figure si triste, comme j'aurais voulu la voir s'illuminer encore