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I76 LE SYLPHE Sur les coteaux tout verts ils font des taches blanches ; Ils parlent des Edens entrevus tant de fois, Et comme des oiseaux qui chantent dans les branches, On entend dans leur sein rire de jeunes voix. Derrière leurs barreaux et derrière leurs grilles, Mêlant beaucoup de joie à leur austérité, Ils laissent gazouiller l'essaim des jeunes filles, Colombes de douceur et de virginité. Us semblent, tout baignés d'une pure lumière, Ne pas voir à leurs pieds le monde vicieux, Et comme agenouillés dans leur robe de pierre, Prier sur la colline en regardant les cieux. Ma sœur, il t'est donné de passer ta jeunesse Dans un de ces abris de la sainte pudeur, Puisses-tu dans la paix y grandir en sagesse, T'enveloppant de grâce et d'exquise candeur ! Si plus tard tu descends parmi l'humaine foule, Si Dieu veut te donner au monde, puisses-tu De la maison pieuse où ton printemps s'écoule, Garder comme un parfum d'éternelle vertu ! On peut voir quelquefois un fleuve au cours limpide, Traverser en riant une noire cité ; Même au sein de la fange, il s'avance candide : Pourquoi ? C'est qu'à sa source il est tout pureté ; C'est qu'il eut pour berceau la neige immaculée ; C'est qu'il est un enfant du mont sublime et pur, Et reste dans la ville, ou bien dans la vallée, Chaste comme la neige et beau comme l'azur. Emile TROLLIET.