Page:Le Stylet en langue de carpe.djvu/64

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bandage d’ouate trempée d’alcool. Ensuite je tire le drap sur cette forme cireuse et je reste debout à contempler. Le fin visage remue dans mon cerveau ému toute une littérature sur la mort et ses mystères, le tombeau et ses secrets.

Il m’a fallu plus d’une heure pour accomplir cette besogne atroce de dévêtir une femme à l’agonie. Je me passe les mains sur le front, cherchant quel nouvel acte accomplir. Il me semble qu’elle respire régulièrement et que la cage thoracique soit à peu près intacte. La blessure saigne pourtant un peu. Un sang mêlé de liquide séreux. Qu’est-ce à dire ?

Je m’efforce encore de deviner la gravité du coup par le sens de l’enfoncée. On a frappé de bas en haut, selon la tragique tradition florentine. L’entaille comporte une bavure avant le trou, au ras même du lieu où une dépression légère qui ne s’est pas effacée marque l’effort de défense, et la résistance d’une main qui s’est efforcée de détourner l’arme. La plaie constitue une sorte de bou-