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ta haute Majesté, que ton amoureuse clémence, que tes flammes sacrées suppléent miséricordieusement à notre faiblesse. Car ces deux jeunes gens se sont, inséparablement, avec fermeté d’âme, avec un élan singulier du cœur, avec une indéfectible constance, voués chaleureusement et résolument attachés, dans une soummision, une obéissance absolue, au service de tes vénérables et saintes lois, décidés qu’ils sont à ne s’en jamais distraire. Voilà plusieurs jours que ce jeune homme s'y affermit en ethlète déterminé, intrépide et brave. Quant à cette jeune fille, elle professe scrupuleusement ce même culte, mettant son espoir dans ton patronage efficace et divin, dans l’impétration de ton secours. J’intercède donc pour eux, je prie, je supplie ta haute sainteté, ta puissance sublime de répandre sur eux, avec munificence, les grâces désirées. O Cypris ! par les amoureuses ardeurs dont il te plut de t’enflammer pour ton Mars chéri, par ton fils qui vit près de toi, avec ce Dieu, dans les déclice suprêmes et les glorieux triomphes ! »

À ce discours toutes les vierges consacrées répondirent à haute voix : « Ainsi soit-il ! » La grande prêtraise n'eut pas plutôt clos ses lèvres sur ces oraisons saintes, sur cette pieuse intervention, que, très-experte dans la conduite des choses sacrées, elle prit des roses odorantes, tout exprès préparées, ainsi que quelques coquilles d’huîtres marines, et, de ses mains pures qu’elle en avait remplies, les répandit cérémonieusement sur l'autel, autour du foyer. Puis, avec une coquille d'huître, puisant de l’eau de mer contenue dans la petite urne, elle en aspergea tout l’autel divin.

Après quoi, les deux cygnes ayant été égorgés sur l’anclabris, à l’aide de la sécespite, leur sang fut recueilli conjointement avec celui des tourterelles déjà brûlées,