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c’est la gravure que le sculpteur plein d’art avait creusée d’une façon visible à l’entour de la panse de la lampe de cristal. C’était une intaille représentant, admirablement adapté à l’objet, un combat d’enfants montés sur de rudes et rapides dauphins aux queues en spirales, se livrant à des mouvements et prenant des attitudes rendant bien une lutte enfantine. Il semblait que Nature elle-même eût fait cette œuvre qui paraissait être en relief et non en creux ; cela, rendu si merveilleusement que mes yeux étaient contraints de se détacher quelque peu de la vue si délectable de la nymphe qui me guidait. La lumière, en vacillant, communiquait à cette gravure l’apparence du mouvement.

Pour finir avec cette magnifique structure de temple, il me reste à dire brièvement qu’elle était bâtie de marbre augustal[1] en partie, et en partie du marbre précité[2], le tout parfaitement joint sans ferrure ni attache d’aucune sorte, avec des recherches de sculpture que notre siècle non-seulement ne pourrait exécuter, mais qu’il n’imaginerait même pas. Psammitique l’Égyptien n’éleva pas un temple semblable au dieu Apis[3].

Sous les bases des pilastres, dont la partie inférieure formait, ainsi que la ligne supérieure contenant les chapiteaux, un lien continu, courait en rond, sur le pavé très-égalisé, un ruban ou bande en porphyre très-fin, large autant que la projection du carré de chaque base. À cette bande était juxtaposée une autre

  1. Marbre trouvé à fleur de terre, pour la première fois sous le règne d’Auguste. (Pline, XXXVI, 7.)
  2. Alabastrite, sorte de marbre onyx. (Pline, XXXVI, 8.)
  3. Psamétik. Il éleva le portique du temple de Vulcain à Memphis et construisit la tour d’Apis, dans laquelle on nourrissait le Dieu dès qu’il s’était manifesté. (Herodote, II, 153.)