Page:Le Salmigondis tome 3 1832.djvu/185

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
169
LE FRÈRE ET LA SŒUR.

avec usure leurs regards de défiance et de haine.

Mais s’il se résignait à endurer l’injuste aversion, les injures de ses compatriotes, avec une contenance calme, qui ne manquait jamais de fierté, il éloignait avec la plus tendre vigilance sa jeune sœur de ces scènes pénible. Chaque matin, il la conduisait, cachée sous un long voile, dans quelque obscure église, où ils entendaient la messe. Quand, aux jours de grande fête, les temples étaient encombrés de dames et de cavaliers richement parés, de bourgeois et d’artisans dans leurs habits de gala, ce couple aimable gagnait une place solitaire et sombre, l’un se penchant en souriant du côté de la belle enfant, qu’il regardait avec des yeux paternels, l’autre se pressant timidement contre son unique protecteur. Flora ne connaissait aucune affection sur la terre, hors celle qu’elle sentait pour son frère. Elle était sa cadette de sept ans ; elle avait grandi sous ses yeux ; et, tandis que leur père se mourait lentement sur son lit de douleur, Lorenzo avait rempli sa place auprès d’elle, et lui avait tenu lieu de parens, de tuteur. La plus tendre mère n’aurait pu l’égaler en complaisance, en dévouement, et le sentiment que lui inspirait sa jeune sœur re-