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en résultait étaient funestes à la convalescence d’Alfred de Musset. Il fallait qu’il s’éloignât. Son immolation n’avait pas supprimé son amour. Le 29 mars, il fit viser son passeport. George Sand avait vainement essayé de le retenir ; car il courait la ville, échappant à la surveillance de son gondolier pour entrer dans les tavernes. Il avait quitté le domicile commun, sans doute afin de se soustraire au spectacle du bonheur de Pagello, et il écrivait à George Sand, au moment du départ : « Adieu, mon enfant, je pense que tu resteras ici et que tu m’enverras l’argent par Antonio[1] Quelle que soit ta haine ou ton indifférence pour moi, si le baiser d’adieu que je t’ai donné aujourd’hui est le dernier de ma vie, il faut que tu saches qu’au premier pas que j’ai fait dehors avec la pensée que je t’avais perdue pour toujours, j’ai senti que j’avais mérité de te perdre, et que rien n’est trop dur. Mais s’il t’importe peu de savoir si ton souvenir me reste ou non, il m’importe à moi, aujourd’hui que ton spectre s’efface déjà et s’éloigne devant moi, de te dire que rien d’impur ne restera dans le sillon de ma vie où tu as passé, et que celui qui n’a pas su t’honorer quand il te possédait peut encore y voir clair à travers ses larmes, et t’honorer dans son cœur, où ton image ne mourra jamais. Adieu, mon enfant. »

Sur le verso de cette lettre apportée par un gondolier, George Sand écrivit au crayon la réponse suivante :

« Al signor A. de Musset.

« Non, ne pars pas comme ça ! Tu n’es pas as-

  1. Un jeune perruquier qui accompagna Musset à Paris.