soldats, sera plus touché de la voix de ses prêtres que de tous les petits vers du monde… (Cette personnalité excita des murmures.)
Le clergé a un génie supérieur au vôtre, reprit le cardinal en haussant la voix ; tous les pas que vous avez faits vers ce point capital, avoir en France un parti armé, ont été faits par nous. Ici parurent des faits… Qui a envoyé quatre-vingt mille fusils en Vendée ?… etc., etc.
Tant que le clergé n’a pas ses bois, il ne tient rien. À la première guerre, le ministre des finances écrit à ses agents qu’il n’y a plus d’argent que pour les curés. Au fond, la France ne croit pas, et elle aime la guerre. Qui que ce soit qui la lui donne, il sera doublement populaire, car faire la guerre, c’est affamer les jésuites, pour parler comme le vulgaire ; faire la guerre, c’est délivrer ces monstres d’orgueil, les Français, de la menace de l’intervention étrangère.
Le cardinal était écouté avec faveur… Il faudrait, dit-il, que M. de Nerval quittât le ministère, son nom irrite inutilement.
À ce mot, tout le monde se leva et parla à la fois. On va me renvoyer encore, pensa Julien ; mais le sage président lui-même avait oublié la présence et l’existence de Julien.
Tous les yeux cherchaient un homme que Julien reconnut. C’était M. de Nerval, le premier ministre, qu’il avait aperçu au bal de M. le duc de Retz.
Le désordre fut à son comble, comme disent les journaux en parlant de la Chambre. Au bout d’un gros quart d’heure le silence se rétablit un peu.
Alors M. de Nerval se leva, et, prenant le ton d’un apôtre :
— Je ne vous affirmerai point, dit-il d’une voix singulière, que je ne tiens pas au ministère.
Il m’est démontré, messieurs, que mon nom double les forces des jacobins en décidant contre nous beaucoup de modérés. Je me retirerais donc volontiers ; mais les voies du Seigneur sont visibles à un petit nombre ; mais, ajouta-t-il en regardant fixement le cardinal, j’ai une mission ; le ciel m’a dit : Tu porteras ta tête sur un échafaud, ou tu rétabliras la monarchie