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LE PRÉSENT.

tous les serments, ils pensent en leur cœur que c’est une bannière menteuse, et le moyen de déraciner cette erreur, quand ils vous objectent l’affirmation hautaine, l’arrogance égale du porte-bannière dans les camps les plus divers ! Je dirai toutefois ici, pour rendre témoignage à la vérité, la pure et vraie doctrine de l’Église.

L’Église n’est d’aucun parti. Elle ne compromet point la science de l’éternité qu’elle possède dans les incertitudes et les variations des opinions purement humaines. La croix est le phare inébranlable planté sur le rivage où tous àbordent, et les heureux qui montent des vaisseaux aux pavillons victorieux, et les naufragés que la tempête pousse au bord avec leurs barques vaincues. L’Église elle-même ne se hasarde pas sur l’agitation et le tumulte des flots. Elle est la vie, la vie éternelle ; comment pourrait-elle s’attacher à ces mille et une doctrines de la sagesse des hommes, que la mort atteint les unes après les autres pour les rendre encore au jour et les replonger ensuite dans la nuit par une perpétuelle résurrection et un perpétuel trépas ? Ici la liberté meurt, là elle renaît ; l’autorité monte ici, là elle descend ; cependant l’Église est partout, et couvre de son indulgente pitié la vanité de tous les systèmes, le mensonge de toutes les théories. Elle bénit tous les berceaux, elle bénit toutes les tombes, elle a des prières égales pour ses enfants de tous les drapeaux ; c’est un blasphème et une impiété que d’inscrite son nom sur une liste de votes. Sa robe blanche lui suffit ; qu’on ne lui mette point d’uniforme ; ils sont faits pour être tachés de sang.

Je ne veux prendre qu’un exemple pour préciser davantage et mieux marquer les dangers que fait courir à l’Église la mobilité d’humeur de M. Veuillot. Sous la République, il a été républicain, et il a assis la liberté, comme un enfant béni, sur les genoux et dans le giron de l’Église catholique. Alors que je dis la liberté, j’entends l’ensemble des diverses libertés qu’il exaltait : liberté d’association, liberté de tribune et de discussion, liberté de la presse, etc. Quand une forte main, celle de l’Empereur, se fut posée sur les destins de la France et eut restauré le pouvoir, M. Veuillot, comme ces joueurs d’orgue de Barbarie qui vont chercher un sou de croisée en croisée, donna un coup de pouce à sa serinette. Il jouait la Parisienne sous les balcons de l’Hôtel-de-Ville, il joua Partant pour la Syrie sous les balcons des Tuileries. Il glorifia le pouvoir et dit anathème à la liberté. N’a-t-il point entendu cependant, l’imprudent, une bouche auguste promettre que la liberté couronne¬