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LE CATHOLICISME ET M. VEUILLOT.

de la révolution à des laïques, engagés comme leurs concitoyens dans la grande lutte, dévoués de cœur et d’esprit aux principes nouveaux, à l’égalité nouvelle, à la liberté ajournée mais non sacrifiée, à sa dynastie qui devait en être la gardienne et le soutien. Le clergé renfermait son œuvre dans les limites du sanctuaire. On ne lui enlevait point l’empire des âmes qu’il possédait toujours par le culte, par la prière, par la prédication ; on lui adjoignait seulement un corps d’hommes de lettres et de savants chargé de former les intelligences au nom de l’État, pour l’État, et par les doctrines de l’État. On lui laissait le chrétien à bénir, on lui enlevait l’instruction du citoyen.

Ce fut là certainement une des plus heureuses créations du régime impérial. En dehors des enseignements religieux que se partagent, au nom de dieux différents et puisant leurs titres dans les régions éternellement inconnues et éternellement disputées du ciel, le juif, le protestant, le catholique gallican, le catholique ultramontain, il fondait renseignement certain de la science humaine. Dans ces écoles ouvertes indifféremment à l’autorité de la parole sacrée, quelle qu’elle fût et quelle qu’elle eût été choisie par le père de famille en pleine possession de son droit, il faisait dire, par des maîtres à lui, sa volonté, sa loi, son dogme politique. Ainsi l’unité de la France était assurée et poursuivie jusque dans les derniers replis des jeunes esprits français. Unité du territoire par la création de 86 départements, unité de législation par le code, unité des intelligences par la création de l’Université, et au sommet unité de direction et de pouvoir dans sa personne, telle était la ferme volonté de l’Empereur. L’Université répondit à ses vœux. À travers les vicissitudes des gouvernements et les changements de systèmes, elle garda la foi qui lui avait été donnée en dépôt. Elle resta patriote » sagement libérale, inébranlablement attachée aux doctrines de la révolution sanctionnées et définitivement acceptées par l’Empire. Si quelques écarts de parole, quelques licences de pensée troublaient un moment la paix de ses écoles, une réunion de magistrats à elle, pris dans son sein, avertissait l’inexpérience, contenait l’audace, réprimait la témérité. C’est contre cette grande institution, gardienne prudente et vigilante de l’esprit nouveau, dépositaire de la science ancienne et moderne, que M. Louis Veuillot dirigea ses premiers coups. Étranger à la question, bouffi seulement d’outrecuidance et d’un désir interné de bruit et de renommée, il entra par là dans la voie pleine