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LE PRÉSENT.

tres de la littérature comique avec lesquels vous avez un commerce si intime et si lucratif ?

Le compositeur chargé de mettre en musique ce poëme mesquin et usé n’en est pas à son coup d’essai : c’est M. Clapisson, le producteur si fécond d’albums du jour de l’an, l’auteur de plusieurs opéras qu’on pourrait aisément découper en romances, car voilà le genre favori, le genre presque exclusif auquel sa vocation ou plutôt l’habitude le ramène sans cesse. Est-ce donc là ce qui avala à M. Clapisson la place de fournisseur du Théâtre-Lyrique, dans laquelle il semble devoir remplacer Adolphe Adam de si regrettable mémoire ? Nous l’ignorons, mais à notre avis, il y a loin de la romance à l’opéra. J’espère que M. Clapisson ne s’offensera pas d’une aussi innocente remarque et c’est nous-mêmes, nous plutôt qui aurions le droit de nous fâcher un peu contre lui. Car enfin ne nous faut-il pas rendre compte de son œuvre à des lecteurs dont nous tenons à ne pas fatiguer l’attention et à qui nous serions heureux d’offrir ici une analyse variée ? Or, comment, je le demande, éviter la monotonie, quand sur dix-huit ou dix-neuf morceaux qui composent un ouvrage, onze ou douze au moins sont des chansons, couplets ou romances à une voix ? Comme on pourrait ici nous taxer d’exagération, nous dresserons une liste justificative qui prouvera au moins que nous avons écouté consciencieusement. 1o Couplets de Mlle Girard. 2o Couplets de M. Meillet. 3o Couplets dialogués de Mme Miolan et de M. Montjauze. 4o Couplets de M. Montjauze. 5o Romance de Mme Miolan. 6o Couplets de M. Montjauze. 7o Couplets de M. Meillet. 8o Couplets de M. Froment. 9o Romance de M. Montjauze. 10o Couplets de Mlle Girard. Enfin deux airs de Mme Miolan. En voilà bien douze, c’est-à-dire trop de moitié. Allez au théâtre du boulevard et vous serez convaincus tout comme nbus. Comme critique générale, nous devons encore signaler le défaut de caractère nettement accusé, de cette belle individualité, en un mot, qui dans une simple modulation, dans la moindre phrase harmonique, fait reconnaître la main du maître qui l’a écrite. Sans doute il y a du bon, du joli surtout dans cette œuvre ; mais où donc est ce souffle puissant qui anime tant de belles compositions ? En vérité il faut regretter que le genre favori de l’auteur lui ait un peu raccourci l’haleine et rétréci l’imagination.

L’introduction (car d’ouverture il n’y en a point) est une symphonie imitative annonçant le réveil d’une ferme ; on entend le cri de la poule et du canard, le beuglement des veaux et une foule d’autres bruits aussi peu poétiquement harmonieux. Ceci touche de trop près au réalisme d’un goût douteux qui depuis quelque temps envahit le monde des arts. Il était possible, sinon facile, de faire mieux, et nous n’avons pour le prouver qu’à rappeler l’admirable, la sublime symphonie pastorale de Beethoven. Le premier acte est sans contredit le plus heureusement trouvé des trois, le plus riche en beautés de détail, nous pouvons y signaler jusqu’à trois morceaux véritablement