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REVUE MUSICALE.
MARGOT, opéra-comique en trois actes de MM. de Saint-Georges et de Leuven, musique de M. Louis Clapisson.

Le Théâtre-Lyrique a commencé de jouer la pièce qu’il doit servir à son public jusqu’au retour des fleurs et du soleil. D’ici là, nous ne pouvons espérer de voir l’afflche varier son programme, et Margot, comme ses devancières la Fanchonnette et la Reine Topaze, trônera sans rivale, recueillant trois ou quatre fois par semaine des moissons de couronnes et attirant dans la caissede grosses recettes. Ce n’est pas que la nouvelle venue soit plus que ses aînées un chef-d’œuvre de grâce, d’esprit ou d’harmonie ; mais à quoi bon chercher des chefs-d’œuvre quand on est sùr du succès ? Un directeur de théâtre n’est pas tenu d’être un apôtre éclairé et dévoué de l’art, c’est un spéculateur exploitant le goût bon ou mauvais du public, et Dieu sait s’il s’occupe, s’il est même en état de s’occuper du mérite littéraire ou artistique des pièces composant son spectacle ; ceci soit dit du directeur en général, et sans aucune allusion personnelle. Ce qui est bien personnel à M. Carvalho, c’est madame Miolan, et madame Miolan c’est la fortune d’une administration, c’est la joie de ceux qui l’entendent, c’est l’assurance du succès pour les opéras dont l’interprétation lui est confiée, quelle qu’en soit la valeur. Avec cette certitude de réussite, il serait beau et bien à madame Miolan de prendre sous son patronage les œuvres des compositeurs méconnus auxquels elle pourrait ouvrir les voies de la fortune et de la renommée. La direction n’y perdrait pas, l’éminente cantatrice y gagnerait la satisfaction qui accompagne toute bonne action, et l’on n’aurait plus le droit de reprocher à ce théâtre de ne pas remplir le but principal pour lequel il a été institué. Du reste, nous le demandons à tous les connaisseurs, à tous les habitués même du Théâtre-Lyrique, les trois opéras chantés par madame Miolan portent-ils les uns ou les autres ce cachet, ce caractère de distinction et de supériorité qui devrait signaler les productions d’hommes ayant déjà un nom établi, une place faite dans le monde des arts ? Non ; on dirait que compositeurs et auteurs, se reposant entièrement sur le talent de leur principal interprète, n’ont pas jugé néces-