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POÉSIES

PAYSAGE PARISIEN.


Je veux, pour composer chastement mes églogues,
Coucher auprès du ciel, comme les astrologues,
Et, voisin des clochers, écouter en rêvant
Leurs chants mélodieux emportés par le vent.
Les deux mains au menton, du haut de ma mansarde,
Je verrai l’atelier qui chante et qui bavarde,
Les tuyaux, les clochers, ces mâts de la cité,
Les grands ciels bleus qui font rêver d’éternité !
C’est plaisir, à travers les brunes, de voir naître
L’étoile dans l’azur, la lampe à la fenêtre,
Les fleuves de charbon monter au firmament,
Et la lune verser son pâle enchantement.
Je verrai les printemps, les étés, les automnes,
Et, quand viendra l’hiver aux neiges monotones,
Je fermerai partout portières et volets
Pour bâtir dans la nuit mes féeriques palais.
Alors je rêverai des horizons bleuâtres,
Des jardins, des jets d’eau pleurant dans les albâtres,
Des baisers, des oiseaux chantant soir et matin.
Et tout ce que l’Idylle a de plus enfantin.
Et l’émeute aura beau tempêter à ma vitre,
Je ne lèverai pas le front de mon pupitre,
Et ne bougerai plus de l’antique fauteuil,
Où je veux composer pour un jeune cercueil
(Il faut charmer nos morts dans leurs noires retraites)
De doux vers tout fumants comme des cassolettes.