Page:Le Présent - Tome deuxième, 1857.djvu/456

Cette page a été validée par deux contributeurs.
436
LE PRÉSENT.

et de Landivisiau, brigadier général, reçurent alors l’autorisation de capituler ; et, sur le désir rationnel qu’ils exprimèrent que le général en chef assumât, ainsi que les devoirs de sa charge l’exigeaient, la responsabilité de cet acte, Lally leur déclara « qu’il se démettait de l’autorité que le Roi et la Compagnie lui avaient confiée et qu’il les chargeait seuls de l’événement ». En dernier lieu, par une contradiction inqualifiable, il ordonnait à de Landivisiau de faire sauter les bastions Saint-Louis et Saint-Laurent et de jeter les poudres dans les fossés de la place. En cette extrémité, le conseil supérieur envoya des parlementaires au colonel Coote qui commandait le siége : mais celui-ci, très-étonné de leur démarche, leur présenta une lettre de Lally par laquelle leur général déclarait se rendre à discrétion. Les troupes anglaises entrèrent en effet, le lendemain matin, 16 janvier 1761, dans la place qui leur était ouverte. Le 18, Lally partait en palankin pour Madras. Mais il fallait traverser une ville soulevée contre lui, subir les reproches et les exécrations d’une foule exaspérée par la misère et le désespoir.

Pâle, à moitié vêtu, deux pistolets aux poings, escorté de quinze hussards anglais, il sortit enfin de Pondichéry, poursuivi par les clameurs furieuses des Français et des indigènes, qui lui portaient une haine plus vive encore, s’il était possible, depuis que deux mille d’entre eux avaient été expulsés par son ordre, avec leurs familles, et assaillis à la fois par le feu de la ville et la mitraille des Anglais. Le commissaire ordonnateur, Duboys, qui, à titre d’intendant de l’armée, avait présidé à l’exécution des mesures arbitraires de Lally, se voyant aussi interpellé et menacé, se jeta, l’épée à la main, au milieu des groupes. Un officier du bataillon colonial vint à lui ; le combat s’engagea, et l’intendant tomba mortellement blessé. Les hussards dispersèrent la foule à coups de sabre. Duval de Leyrit, les conseillers, les sous-marchands, l’état-major et la garnison furent dirigés sur Madras et Saint-Thomé. Ils devaient être transportés en Angleterre. Les habitants espéraient encore que leurs propriétés et leurs personnes seraient respectées. On se hâta de les détromper. Le colonel Coote et le gouverneur de Madras, Pigot, ordonnèrent que les fortifications de la place fussent immédiatement démolies, que les églises, les mosquées, les pagodes et les maisons particulières fussent incendiées et rasées. Les hommes, les femmes et les enfants furent chassés à coups de crosses de fusil