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LE PRÉSENT.

vaisseaux anglais qui couraient des bordées à soixante-dix lieues sous le vent.

La présence de l’escadre ennemie à la hauteur de Madras et l’absence de la nôtre rendaient impossible une tentative contre une place forte, bien défendue et pouvant recevoir en toute sécurité des approvisionnements et d’immenses renforts. Lally dut donc y renoncer. Jusqu’alors, sauf son intervention violente dans les affaires administratives de la colonie, sa conduite militaire était sans reproches. Il avait même témoigné d’une grande activité et d’un louable désir de mener hardiment la guerre. Mais, se voyant dans l’impossibilité de marcher dans le nord, et, néanmoins, très-jaloux d’étendre son autorité sur tous les points de la péninsule occupés par nous ; incapable d’ailleurs d’apprécier les avantages politiques d’une action permanente dans le Dekkan et sur la côte d’Oryçâh, il écrivit à Bussy et à Moracin des lettres insensées. « Non seulement je ne vous enverrai pas les trois cents hommes que vous me demandez, disait-il au chef de Matçulipatnam, mais je vous ordonne de replier tous les postes que vous occupez et de rejoindre immédiatement l’armée. Mes instructions sont de chasser les Anglais de la côte de Coromandel. Tout autre objet dans l’intérieur du pays doit céder à celui-ci. » — « Il est temps, monsieur, écrivait-il à Bussy, de mettre fin à la guerre que vous soutenez. Le roi et la Compagnie m’ont envoyé dans l’Inde pour en chasser les Anglais ; c’est contre eux que nous combattons. Tout autre intérêt m’est étranger. Il m’importe peu qu’un frère dispute le Dekkan à son frère, ou que tel radjah convoite telle ou telle nababie. Je me borne à vous retracer toute ma politique dans ces cinq mots : Plus d’Anglais dans la péninsule ! » Et il lui ordonnait de quitter le Dekkan avec toutes ses troupes.


Il était difficile d’accumuler en aussi peu de mots autant d’erreurs de fait et d’idées fausses. Nous ne soutenions aucune guerre contre les Mongols dans les provinces du nord : là, comme au midi, les Anglais étaient nos seuls ennemis et les adversaires du Çubah. Law de Lauriston commandait, au Bérar. L’armée d’Ali-Gohor, l’héritier de l’empire. Nos intérêts et ceux des principaux chefs indigènes étaient identiques. C’était, en outre, choisir un étrange moyen d’expulser les Anglais de la côte de Coromandel, que de leur permettre