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LE PRÉSENT.

— Josuah, dit le docteur, je t’attache à la surveillance de ma propriété. Tu ne dois pas la perdre de vue, le jour ni la nuit, autant que possible. Tu me réponds de sa bonne conservation. Tu recevras une guinée de salaire par jour, et une pension viagère, en récompense, après ta mission fidèlement accomplie.

James approcha alors des narines de Charlie un flacon de sels volatils. Le géant éternua à faire tembler les vitres et se leva en se frottant les yeux.

— Adieu, lui dit le docteur, tu as tes bank-notes dans ta poche. Charlie restait debout, comme hébété. Il se grattait machinalement le bras gauche. L’opération pratiquée par James n’était pas douloureuse : elle laissait simplement après elle une démangeaison qui devait cesser bientôt, Le docteur avait eu soin de frictionner le bras avec de l’éther.

James étant sorti de la taverne, le géant le suivit à distance et le vit rentrer dans son logis. Il se fit dire le nom de la rue par un passant, et puis il se retira en agitant les mains d’un air assez allègre. Il entra chez un débitant de ginn, et il se mit à compter son trésor, tout en buvant de gigantesques gorgées d’eau-de-vie de genièvre.

Le petit Charlie remettait sa fortune en poche et il se disposait à partir, lorsque soudain il tressaillit et retomba assis. James et Josuah étaient debout à la porte du marchand de ginn. Le docteur avait l’index tendu du côté du géant et paraissait désigner celui-ci à la surveillance d’un chef de policemens.

Charlie se signa et sortit précipitamment en se faisant avec ses larges mains deux œillères.

Il courut longtemps dans les rues sans se retourner. Il finit par descendre les degrés d’une cave dont l’ouverture bayait à fleur de trottoir. C’était la boutique d’un marchand de vieux habits.

À Londres, les ouvriers et les pauvres n’ont pas un costume particulier, comme en France, par exemple. Ils ne portent pas la blouse, cet uniforme de la misère ou du travail. Les Londoniens, riches et pauvres, revêtent le paletot et l’habit. Seulement, les pauvres achètent des vêtements qui ont déjà servi. Selon son degré de pauvreté, on s’en procure qui ont été vendus une ou plusieurs fois.

Je me rappelle avoir vu à Londres, au milieu d’un carré de verdure de Russell square, un homme en habit noir, pantalon noir, gilet noir,