liée avec sa sœur. Il causa avec elle et fut ravi de ses grâces ingénues, de sa beauté. Ce gentlemen faisait partie de l’association clandestine de Regents-Park. Quelques jours après, il vit arriver dans le repaire de Regents-Park l’Irlandaise, la compagne de sa sœur. Elle suivait sans défiance dans cet hôtel suspect, pauvre agneau à l’abattoir, sa prétendue protectrice, la dame de céans. Celle-ci venait de la retirer de sa pension.
Le gentlemen fut singulièrement surpris en voyant que la compagne, l’amie de sa jeune sœur, était une proie réservée d’avance à ses compagnons de Regents-Park. Il fit un rapide retour de conscience sur sa sœur et sa jeune amie — il eut horreur de lui-même, du lieu où il se trouvait — il frémit du danger qui menaçait l’innocente fille — la dame du logis s’étant éloignée un instant, le gentlemen dévoila en deux mots l’odieuse situation à l’amie de sa sœur, et, par une résolution subite, il l’entraîna hors de l’hôtel. Quelques jours après, il me faisait faire ce portrait. S’il a tenu sa promesse, il doit avoir épousé ma belle inconnue depuis plus d’un an.
— Il l’a épousée en effet, dit tranquillement le docteur.
— Vous les connaissez donc ! s’écria le peintre.
— Oui, mon jeune ami, mais jamais vous ne saurez leur nom. C’est un secret, ajouta-t-il d’un ton absolu et sans réplique.
Le docteur fît un soubresaut en entendant sonner l’horloge. Il consulta rapidement les aiguilles.
— Ce n’est que la demie qui sonne, dit-il ; encore trente minutes à attendre.
Il ajouta, en laissant retomber ses regards sur M. Léon :
— Est-ce que vous comptez rester longtemps à la taverne ?
— Rien ne m’appelle dehors en ce moment, répondit M. Léon. Un respectable ami et un bon pot d’ale, sont une excellente compagnie que je me propose de ne pas quitter.
— Nous avons vingt-cinq minutes à rester ensemble, répliqua brusquement James.
Le peintre ne s’étonna pas de cette remarque faite avec le ton d’une injonction. Il paraissait habitué à l’imprévu des façons de dire et d’agir du docteur.
Nous savons que la taverne était établie au rez-de-chaussée de la maison. Une boiserie d’acajou couvrait les murs depuis le plancher