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LIVRES ET JOURNAUX.

vaudra celle d’un cœur de jeune fille qui commence d’aimer. La poésie descriptive ou métaphysique est et demeurera un genre secondaire, ce dont les gens de goût ne se plaindront point. Des esprits élevés comme celui de M. Thalès Bernard, des talents fermes comme le sien essaieront en vain d’enlever la poésie au-dessus de la terre. C’est une erreur que de lui prêter des ailes, elle a les pieds légers, voilà tout.

Aussi, comme je préfère au volume tout philosophique de M. Bernard cette feuille qui lui est annexée et qui porte ce titre : Mélodies pastorales. Là l’écrivain se montre poëte : à la bonne heure ; là il quitte enfin sa robe de docteur panthéiste. — Dieu veuille qu’il ne la reprenne plus !

LES VIERGES, par M. Barrillot[1].

La Vierge aux bandelettes, la Vierge aux guenilles, la Vierge au fuseau, la Vierge aux chèvres, etc… Quelle abondance de vierges, grand Dieu !

Au milieu de tous ce fatras virginal il n’y a que la muse, elle-même, de M. Barillot qui ait cessé détre vierge. La pauvre muse a follement couru par le monde ; elle s’est laissé mener dans la chambre de plus d’un maître poëte, et il faut bien qu’on y ait un peu déchiré sa robe, car elle en est sortie avec des vêtements d’emprunt :


Partout la solitude et partout le silence ;
Je n’entends que la voix du Simoun qui s’élance
Et les brises du Nil soufflant dans les roseaux ;
Où couraient autrefois tant de rumeurs humaines,
Tant de bruit, je n’entends que les folles haleines
Mc jeter en passant des gazouillis d’oiseau.


Ô Victor Hugo !



La Revue contemporaine publie dans son numéro du 15 octobre une nouvelle de M. Arthur Arnould, Madeleine Lambert. C’est l’histoire toujours navrante d’un poëte sans talent, histoire racontée par la femme que son orgueil féroce a brisée. La victime n’a point cessé d’adorer le faux dieu qui l’avait aveuglée ; elle est frappée à mort, et mourrait à l’instant même, si son illusion lui était enlevée.

Ce récit est touchant, bien conduit, et plusieurs inci lents, la rencontre, par

  1. Gabriel Roux, 24, rue des Grands-Augustins.