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LE PRÉSENT.

tous les écrivains de talent ne rencontrent pas, ou que bien peu ont rencontré plus d’une fois. C’est le Dernier Rendez-vous. Je ne peux, sans y repenser, ouvrir un roman de M. Murger ; la Vie de Bohème et bien d’autres livres ont fait de lui, sans conteste, le premier de nos jeunes romanciers : les cent pages du Dernier Rendez-vous, si on les connaissait bien, lui donneraient un plus haut rang ;

LA LORGNETTE LITTÉRAIRE ; Dictionnaire des grands et des petite auteurs de mon temps, par M. Charles Monselet[1].

La Lorgnette littéraire est au nombre de ces livres gais qui échappent à l’analyse, parce que le rire est une chose qui ne se mesure ni ne se pèse jamais. — M. Charles Monselet descend en ligne directe de Chamfort et de Rivarol ; il est du siècle précédent, quoiqu’il connaisse si bien les gens du nôtre. Il traite ses confrères des lettres en amis. Que dis-je ? il les aime si tendrement qu’il veut avoir leurs portraits à tous, et, de peur qu’un autre ne les manque, ces portraits chéris, il les grave lui-même. — Qu’ils y prennent garde : son burin est bon.

Le livre porte, sur sa couverture, un caducée avec cette devise : Concordiœ fructus. — Est-ce une ironie de plus ? Il paraît cependant que la paix ne règne plus autour de M. Monselet, et que plusieurs des protraiturés grondent de se trouver si ressemblants. Ah ! si tous ceux que M. Monselet a oubliés dans sa galerie osaient parler, ce serait bien pis. J’engage vivement l’auteur à adresser une lettre d’excuse* à MM. les XX, — car voilà vraiment ceux qui ne lui pardonneront point.

POÉSIES NOUVELLES par M. Thalès Bernard[2].

La meilleure analyse qu’on pourrait faire ici des Poésies nouvelles de M. Thalès Bernard serait de transcrire la préface du livre. M. Bernard n’est point satisfait de la poésie contemporaine, et il le déclare du reste fort simplement. Chose étrange ! ce n’est pas avec moins de modestie qu’il offre à la France de lui indiquer un genre nouveau. — L’élément intellectuel, l’agitation de la pensée en face de la nature et son élan vers les étoiles où doivent s’accomplir nos destinées, voilà ce genre. M. Thalès Bernard ne veut point se rendre à cette vérité, déjà vieille, et si bien prouvée, que la philosophie n’est point la poésie. Spinoza je savait bien : aussi n’a-t-il jamais essayé de rimer sa doctrine.

Donc, quoi que disent et que fassent MM. les philosophes, ces amants austères de la pensée pure, jamais la peinture de l’agitation éternelle des mondes ne

  1. Poulet-Malassis et de Broise, 4, rue de Buci.
  2. C. Vanier, 12, rue d’Enghien. Rigaud, 50, rué Sainte-Anne