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L’INDE FRANÇAISE.

dans ce temps même, que nos comptoirs étaient livrés à qui voudrait les anéantir. Ainsi abandonné à ses propres ressources, Dupleix entreprit de tout sauvegarder. Pondichéry. Mahé, Matçulipatnam, Chandernagor, furent approvisionnés et mis en état de défense, tandis que de nouvelles cargaisons étaient expédiées aux îles et en Europe. De tels services appelaient les récompenses du gouvernement : elles ne se firent pas attendre. Il est vrai qu’elles ne coûtaient ni un canon à l’administration de la guerre ni une roupie à la Compagnie. Le contrôleur général de Machault lui envoya, au nom du roi, des lettres de noblesse et la croix de Saint-Michel. Peu après, la déclaration de guerre entre la France et l’Angleterre lui fut annoncée. Immédiatement aussi, tous les navires marchands des comptoirs furent saisis par la croisière anglaise, grâce à la persuasion imbécile où étaient les directeurs de Paris, que le traité de neutralité avait été signé dans l’Inde. De son côté, La Bourdonnais en était réduit, aux îles, à la plus profonde détresse ; mais ces deux hommes valaient des flottes et des armées. Tandis que l’un prodiguait sa fortune personnelle pour défendre la côte de Coromandel et le Bengale, le second créait une escadre, disciplinait les volontaires créoles, formait des équipages noirs et se préparait à partir pour Pondichéry. Enfin, six vaisseaux dont le commandement lui était confié arrivèrent à l’Île-de-France. Cinq d’entre eux n’avaient ni artillerie ni canonniers ; il fallut y pourvoir ; ce qui causa de nouveaux retards. L’escadre mit à la voile en mars 1746. Assaillie par un coup de vent terrible à la pointe nord de Madagascar où l’avait conduite la nécessité de faire des vivres, elle se dirigea bientôt sur Mahé, forte de neuf vaisseaux et montée par trois mille trois cents hommes, dont sept cent vingt noirs.

La Bourdonnais apprit à Ceylan que les Anglais l’attendaient à la côte de Coromandel. Il les y rencontra en effet. Très supérieur en artillerie, car les navires français n’étaient armés que de canons de douze et de huit, l’ennemi engagea le combat dans les meilleures conditions, avec l’avantage du vent et de la marche. Cependant, après une action très-vive de trois heures, il se retira à la nuit et ne reparut pas. L’escadre française, chargée de malades et de blessés, n’était pas en mesure de le poursuivre. La Bourdonnais mit le cap sur Pondichéry, où il mouilla le 8 juillet 1746. Dupleix, informé de sa venue prochaine, l’attendait avec impatience, ne doutant pas que ses instructions comme