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L’INDE FRANÇAISE.

l’avant-garde mongole commandée par Kanduran, dans une embuscade où ce corps d’armée fut anéanti. Le mir-bakei lui-même y périt. Le çubah jugea qu’il était temps de contenir les Perses, son ennemi étant mort et Mohhammed n’ayant plus de recours qu’en lui. Un traité fut signé par lequel Nadir-Çah recevrait les quatre kururs de roupies précédemment exigés et devrait se retirer du territoire impérial. Mais le Nizam, loin de tenir les promesses qu’il avait faites à Çadet-Khan, succéda lui-même à la dignité de Kanduran. Le chef de Laknaor résolut de se venger. « Marchez sur Delhi dit-il à Nadir, l’armée est dispersée et sans chef. Saisissez-vous du Nizam-Ul-Muluk qui vous trahit ; emparez-vous de l’empereur même ; je vous garantis seize kururs, au lieu de quatre, pour la rançon de l’empire. »

Mohhammed et le çubah furent arrêtés dans une visite au camp des Perses. Nadir exigea un ordre authentique au gouverneur de Delhi de remettre la ville, le palais et le trésor à ceux qui se présenteraient au nom du roi de Perse. L’ordre fut exécuté. Le trésor ne contenait que trente-cinq laks de roupies. Nadir-Çah envoya chercher Çadet-Khan et lui dit : « Si tu ne trouves d’ici à demain les seize kururs que tu as garantis, je ferai de tes boyaux des cordes à violon. » Ne voulant pas être éventré, Çadet-Khan s’empoisonna. Peu après, Nadir entra dans Delhi, avec Mohhammed et Nizam, ses prisonniers.

Ce n’était pas qu’il persévérât dans le dessein d’envahir l’Hindoustan, l’impossibilité en était trop évidente. L’immense population de Delhi, la crainte de se voir retenu loin des frontières, au milieu d’un pays exaspéré, par un retour offensif de l’armée mongole ; la faiblesse numérique de ses propres troupes, et l’offre réitérée de quatre kururs de roupies, quatre cents millions de francs, pour rançon, étaient même autant de raisons qui l’eussent déterminé à se retirer promptement et sans violence, quand un conflit imprévu entre les soldats et le peuple amena la catastrophe de 1739. Deux mille hommes de la garde avaient déjà rétabli le calme et parcouru la ville sans obstacle. Nadir, retiré dans la grande mosquée, donna l’ordre de commencer le massacre et de n’épargner ni les femmes ni les enfants. L’exécution dura trois heures sur une étendue de deux lieues. Selon Çafçkinkhan, témoin oculaire, quarante mille Mongols et Hindous furent égorgés sans résistance. Il s’agissait enfin de recueillir les fruits de l’expédition. Nadir dépêcha mille cavaliers chargés de saisir, à Laknaor, l’héritage de