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ROMÉO II.

Valentine comme une châsse. Une toilette combinée avec une habile couturière avait été faite exprès pour la circonstance. On avait opté pour une robe blanche, couleur de l’innocence ; on y avait ajouté quelques fleurs. Malgré cette extrême simplicité, Valentine était charmante. Il y avait tant de modestie dans sa tenue, tant de grâce dans son sourire, qu’on l’eût prise pour une strophe au printemps. Les boucles de ses beaux cheveux noirs séparés sur le front, et encadrant ses joues pâles à force d’être blanches, la faisaient ressembler à ces adorables figures que les poètes inspirés nous font entrevoir dans les ballades. Sa mère, en extase devant elle, la regardait avec une sorte de fierté qui semblait dire : Mon cher neveu, Paris est bien grand, les femmes y sont bien élégantes, mais c’est en vain que vous y chercheriez quelque chose d’aussi parfait que ma fille.

Valentine fut présentée à son oncle, M. Duprat, qui lui dit sans aucun. préambule qu’il la trouvait accomplie.

— Vous comprenez, mon frère, disait madame Casimir, que ma fille comblera certainement tous les vœux de votre fils. J’ai bien voulu consentir à condamner Mathieu à l’exil ; mais, en agissant ainsi, je ne me proposais d’autre but que d’augmenter son bonheur. Voilà son trésor ; je suis prête à le lui donner. Qu’il arrive, ce cher enfant, et je me jette dans ses bras !

M. Duprat, partageant l’enthousiasme de sa sœur, attendait Mathieu avec impatience, et expédiait à sa rencontre tous les messagers dont il pouvait disposer.

Plus heureux que ma sœur Anne, le troisième messager revint tout essoufflé, annoncer que M. Mathieu était arrivé. Cinq minutes après il pénétrait dans le salon, où les trois personnages l’attendaient sous les armes.

Mathieu, d’un air grave et solennel, se jeta dans les bras de son père et l’embrassa avec effusion. Ce fut ensuite le tour de sa tante, puis celui de sa cousine.

— Je suis, leur dit-il, très-heureux de vous revoir.

Les jeunes gens de province qui reviennent de Paris portent d’ordinaire un cachet de coquetterie puisé au contact des élégances qu’on coudoie dans cette grande ville. Ils sont habillés selon la dernière mode, coiffés témérairement et très-initiés auxliccnces permises de la galanterie. Mathieu n’avait subi nulle métamorphose ; il était mal mis