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LE PRÉSENT.

J’ai créé tous les dieux d’Homère,
Vêtu Cupidon d’un carquois,
Des flots lascifs formé sa mère
Et de nymphes peuplé les bois.
Je buvais, colombe sacrée,
Dans la coupe d’Anacréon ;
Sur le cap où rêvait Platon,
Que de rêves m’ont enivrée !
Sous le hêtre et dans les vergers,
J’allais, avec le doux Virgile,
Cueillir l’élégie ou l’idylle,
Au son des flûtes des bergers.
Selon les temps, déesse ou fée,
Et chère aux poètes toujours,
J’accordai la lyre d’Orphée
Et la viole des troubadours.

Je me nourris du vent qui passe,
Du parfum qui fuit dans l’espace,
Et, sans en ternir les couleurs,
Je bois au calice des fleurs.
Dans les vallons, sur la colline,
À travers la plaine ou dans l’air,
De l’aile ou du pied je chemine,
Lente ou prompte comme l’éclair.
Dès que l’aurore matinale
Lève sa robe orientale,
Teinte de pourpre et de vermeil,
Je vole au-devant du soleil.
Déjà l’inquiète couvée
S’étonne en regardant les cieux ;
Sur le bord du nid soulevée,