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L’INDE ANTIQUE.

eaux aux sources du Sind, de l’Oxus et de l’Irtiche, sinon dans le voisinage de l’Alborg masdéen ? et dans la géographie de Valmiki, comment suivre le poëte au nord de l’Inde, de sommets en sommets, de lacs sacrés en lacs sacrés, sans dépasser même les frontières boréales du Thibet ?

Ces données, on le voit, resserrent donc dans un cercle commun de voisinage et de contemporanéité les rapports similaires, sinon identiques, que renferment sur les temps primitifs les traditions brahmaniques et masdéennes.

Pour bien saisir ces rapports, il faut remonter jusqu’à cette aube des souvenirs humains, qui flotte indécise entre le mythe et le réel, où Yama le Brillant, fils du Soleil, était reconnu par les Arians du midi et par ceux du nord comme un des fondateurs de leur race et de leurs institutions ; oîi le mot de Manou qui, dans le Rig-Véda, ne se rapporte guère qu’à l’humanité prise collectivement, et parfois au premier homme spécialisé, avait le même sens, la même acception, sous la forme rude et aspirée que lui avaient donnée les tribus du nord-est : Pan-Kou ; où les ancêtres des Chinois, des Iraniens et des Indous, ayant également droit au titre de Poëriokaetchanas[1], conservé par Zoroastre à ses aïeux intellectuels, avaient pour affinités communes, sous des noms et des modes très-peu différenciés, le rite de la coupe et le culûc du feu ; voyaient en celui-ci l’âme du foyer domestique, le génie tutélaire de la famille, et révéraient en celle-là le lion mystérieux qui unissait les chefs de maisons ou de clans, les maîtres de la terre et des troupeaux, à une divinité patronymique, à l’exclusion de la tourbe sans nom et sans dieu des esclaves et des sauvages des forêts, vivant et traités en bêtes fauves.

Cet âge est celui des initiateurs, des inventeurs dans l’art et l’industrie au berceau ; c’est aussi celui de ces chantres sacrés qui, plus tard, sous les titres de Maharchis et de Richis, figurèrent dans la mythologie brahmanique comme des Démiurges, assesseurs et lieutenants de l’être existant par lui-même. Revêtus, dans l’Arie védique, du privilège spécial de la liturgie et des incantations, ils présidaient de droit aux sacrifices sur les hauts lieux. À l’appel des chefs de famille, ils se rendaient sur la montagne qui dominait les terrains de culture ou les pâturages de la tribu. Là, devant un feu consacré, dans une enceinte jonchée d’une herbe

  1. Hommes de la première loi.