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LE PRÉSENT.

ne devait être qu’un intermède de la chute profonde où s’ébattent sur cette vieille terre les générations des hommes. Ce n’était pas l’islamisme qui pouvait donner aux aggrégâts atomistiques de la société indoue le ciment qui leur manque depuis deux mille ans. Ce n’était pas le fatalisme déiste du Koran qui pouvait les relever de leur péché originel, le fatalisme panthéislique, insuffler dans ces âmes esclaves de la nature brute la foi vivifiante dû libre arbitre et de l’activité humaine et les élever du sentiment étroit de la caste à la notion de l’unité tionale.

Sous les faibles successeurs d’Aurungzeb, une puissance nouvelle commença à paraître sur l’horizon politique de l’Inde. C’étaient les Mahrattes, tribus indoues restées indépendantes de la domination musulmane, sons des rajahs de leur sang, mais que les empereurs précédents avaient aisément contenues et châtiées chaque fois qu’elles étaient sorties de leurs territoires pour commettré des déprédations dans le Deccan et les autres provinces éloignées du centre de l’empire.

Affaibli par la perte du Bengale, dont les Soubahs ne payaient plus à la cour de Delhi qu’un vain hommage, Mohammed-Schah, arrière-petit-fils de l’empereur Moezzim, fils d’Aurungzeb, consacra, vers 1730, par un traité honteux avec les Mahrattes, leur suprématie sur son empire, en s’engageant à leur payer annuellement le quart du revenu des provinces sujettes à leurs incursions. Cet aveu d’impuissance fut le signal de la révolte générale. Chaque vice-roi, chaque rajah feudataire de l’empire, tenta de s’en rendre indépendant. Cette anarchie ouvrit les frontières occidentales de l’Inde à une nouvelle invasion. Nadir, plus connu en Europe sous le nom de Thamas-Kouli-Khan, né dans le Khorazan, berger dans son enfance, voleur de grand chemin dans sa jeunesse, avait gravi, à force d’audace et de crime, jusqu’au trône de Perse. Ayant vaincu les Afghans et conquis le Candahar, il passa l’Indus à son tour, sans autre but que d’enlever aux Mogols les trésors qu’ils avaient entassés à Delhi et qu’ils étaient désormais incapables de garder.

Il n’y a guère d’exemples, ni d’une plus grande armée que celle que Mohammed-Schah leva contre Nadir, ni d’une plus grande faiblesse. On assure qu’il opposa douze cent mille hommes, des milliers de canons et deux mille éléphants armés en guerre, à son ennemi, qui n’a-