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FURETIÈRE ET L’ACADÉMIE FRANÇAISE.

reux de contribuer, pour sa part d’études et d’érudition, à l’œuvre d’une compagnie célèbre. Il se voyait travaillant sur la même table avec les premiers écrivains de son temps, avec Pierre Corneille, Racan, Pelisson, Perrot d’Ablancourt, Bossu et, et dans l’avenir avec ses illustres amis, Racine, Boileau, Huet, Patru, La Fontaine, au monument de la langue français ; et il trouvait que c’était assez de gloire pour lui que de fondre son nom dans un si imposant anonyme.

Ce n’est que lorsqu’il eût vu les plus illustrer et les plus dignes s’éloigner des séances, et le travail du Dictionnaire abandonné aux incapables, qu’il conçut l’idée de reprendre son ouvrage, trouvant le sacrifice trop lourd de jeter quarante ans de travaux en pâture à l’ignorance et à l’imbécilité têtue. Mais là il se brisait contre les règlements académiques : lui-même avait serré le nœud qui lui liait les mains. Il ne pouvait plus attendre la gloire que des presses étrangères, après sa mort. Les mauvais traitements l’exaspérèrent ; il répondit et livra le secret de la confrérie. Fut-il prudent ? Non, sans doute ; mais inexcusable !

La postérité a prononcé en faveur de Furetière. Elle a adopté son dictionnaire.

Son roman, exhumé il y a trois ans, a trouvé des lecteurs et des approbateurs.

Le moment paraît donc bien choisi pour tenter une réhabilitation plus complète, en faisant connaître en lui, le maître satiriste, l’un des créateurs du style polémique, un des pères du journalisme.

Quelques jours, sans doute, on montrera le poëte, le poëte satyrique et le poëte conteur. Et alors, le dix-neuvième siècle aura restitué au dix-septième une de ses physionomies littéraires les plus vivaces et les plus complexes.


Charles Asselineau.

(1) La Confession de Sancy.