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LE PRÉSENT.

Que craignez-vous des morts, vous, de qui les mains pures
S’élèvent vers le ciel, vierges de nos souillures,
Et qui, seuls, dites-vous, êtes prédestinés
À donner la sagesse aux peuples nouveau-nés ?
Efforcez-vous, plutôt que nous jeter l’outrage,
De chasser de vos cœurs la discorde sauvage,
Et, s’il est vrai qu’un Dieu vous guide, soyez doux,
Cléments et fraternels, et valez mieux que nous.
Regarde ! tout l’Empire est plein de vos querelles.
Quel jour ne voit germer quelques sectes nouvelles
Depuis que Constantin, voici bientôt cent ans,
Dans Nicée assembla vos pères triomphants
Qui, du temple nouveau pour mieux asseoir la base,
Contraignirent le monde à la foi d’Athanase ?
Vains efforts ! car l’ardeur de vos dissensions
N’a cessé de troubler le cœur des nations.
Que la Pourpre proscrive ou cache l’hérésie,
Portant dans vos débats la même frénésie,
Et par la controverse à la haine poussés,
Au nom du même Dieu tous vous vous maudissez !
Où sont la paix, l’amour, qu’enseignent vos Églises ?
Sont-ce là les leçons à l’univers promises,
Et veux-tu, qu’infidèle au culte des aïeux,
Je prenne aveuglément vos passions pour dieux ?
Cyrille, écoute-moi. Demain, dans mille années,
Dans vingt siècles, — qu’importe au cours des destinées !
L’homme étouffé par vous enfin se dressera:
Le temps vous fera croître et le temps vous tuera;
Et comme toute chose humaine et périssable,
Votre œuvre ira dormir dans l’ombre irrévocable !