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L’ANNÉE DES COSAQUES.

Georges sortit, une escorte et une voiture l’attendaient à la porte ; deux cavaliers se placèrent aux portières, et la voiture roula dans la direction de l’Abbaye.

Georges fut reçu à l’Abbaye par un capitaine, qui le conduisit dans la chambre des condamnés à mort. C’était une petite cellule assez propre, blanchie à la chaux, longue de trois ou quatre pieds, large d’autant ; un lit de fer et une petite table de bois de sapin en formaient tout l’ameublement. Le capitaine, le chapeau à la main, demanda à Georges s’il désirait quelque chose.

— De l’encre, des plumes et du papier, répondit Georges.

— Vous savez, mon prince, que ce sont des objets qu’il nous est défendu de donner, à moins que ce ne soit pour faire votre appel en grâce.

Georges haussa les épaules. L’officier restait debout, l’interrogeant du regard.

— Eh bien ?

— Eh bien ! apportez ; j’écrirai à l’Empereur.

— Oh ! alors, je vais vous faire monter tout cela à l’instant. Et soyez certain, mon prince, que Sa Majesté sera clémente. Il lui en coûterait trop d’être sévère dans un pareil moment. Demain, mon prince, vous serez libre.

Un moment après on apportait au prisonnier encre, plumes et papier.

— Monseigneur n’a pas besoin d’autre chose, demanda le soldat, qui faisait les fonctions de geôlier.

— Non, merci, mon ami.

Les verrous grincèrent dans leurs gonds et Georges se trouva seul. Un moment il écouta le pas lourd et cadencé des soldats qui montaient la garde, l’un à sa porte, l’autre à sa fenêtre ; il voyait à travers les barreaux passer et repasser le plumet jaune de ce dernier. Il fit quelques pas dans son étroite prison, puis s’assit devant sa table et écrivit trois lettres. La première était pour sa mère, la princesse Bariatinski.


« Ma chère mère,

« Quand vous recevrez cette lettre, j’aurai cessé de vivre. Un duel indispensable dans lequel j’ai été l’agresseur a eu lieu ces jours-ci entre moi et le comte Ostrowki ; vous connaissez la rigueur de l’ukase contre