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surveiller et contenir ces initiatives. Les peuples souffrirent souvent des abus de l’autorité pendant les siècles qui suivirent l’invasion des races germaines. Au milieu de leurs souffrances, ils conçurent naturellement de vives sympathies pour deux institutions qui vinrent successivement organiser le contrôle des pouvoirs locaux : pour l’Église, qui tempéra par l’esprit de charité l’usage de la force, et qui inspira aux âmes d’élite les sublimes dévouements de la chevalerie ; pour la monarchie, qui affermit la paix publique en groupant les forces éparses, et en établissant la justice du roi, avec le concours des légistes. Mais, en évitant un écueil, les populations se heurtèrent bientôt à un autre : l’exagération et l’abus, atténués au sein du corps féodal, prirent de grands développements parmi les auxiliaires de la papauté[1] et de la monarchie féodale. Du IXe

  1. Des personnes versées dans l’histoire ecclésiastique m’objectent que les critiques adressées, dans ce paragraphe, au clergé ne tiennent pas compte des services qu’il n’a pas cessé de rendre, et sont peu opportunes en présence des attaques ardentes des sceptiques de notre temps. Je n’ai pu me rendre à cette objection : loin de là, plus j’entrevois le rôle réservé à la religion dans la réforme sociale attendue depuis quatre-vingts ans, et mieux je comprends l’opportunité du plan que j’ai adopté. Pour s’élever à la hauteur de leur devoir social, les catholiques ont surtout besoin de connaître les services rendus aux temps de prospérité (§§ 14 et 16) et les fautes commises aux temps de décadence (§§ 15 et 17). Quant aux omissions et aux erreurs que j’aurais pu faire dans le cadre de ces esquisses sommaires, je m’empresserai de réparer celles qu’on voudra bien me signaler.