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classiques, par les conquérants, par les gouvernants fastueux qui ont enrichi les villes en ruinant les campagnes, et, en général, par de prétendus héros qui ont été, à vrai dire, les fléaux de l’humanité. Les grandes époques de l’histoire ne seront plus liées exclusivement à ces funestes célébrités : elles se rattacheront surtout aux vrais grands hommes dont la mémoire a été trop souvent négligée, c’est-à-dire à ceux qui ont aimé la paix, honoré les Autorités sociales, fortifié la vie rurale, respecté les autonomies locales, protégé les petites nations et, en un mot, créé sans bruit la prospérité publique sur la pratique de l’ordre moral.

Alors on verra apparaître dans toute leur clarté les faits essentiels aux sociétés humaines, et la loi générale de l’histoire[1] : d’un côté, les petites nations pastorales et rurales, conservant les traditions du vrai et du bien dans leurs steppes et leurs montagnes (§§ 64 et 65), loin des mauvaises influences émanant des villes et de la richesse ; de l’autre, les grandes nations, créant leurs cours fastueuses, leurs redoutables armées, leurs villes vouées au luxe et aux arts libéraux, ravageant et illustrant le monde tour à tour, pendant leurs alternances périodiques

  1. Sur ce point, le lecteur consultera avec fruit plusieurs aperçus du bel ouvrage du R. P. Gratry, ayant pour titre : La Morale et la loi de l’histoire. Paris, 1868 ; 2 vol. in-8o.