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sous beaucoup de rapports à celles de l’Orient, agissent souvent dans le même sens que les causes naturelles. Ainsi, les individualités éminentes ont mille moyens de s’élever rapidement au-dessus de la situation où elles sont nées ; mais, en revanche, on voit s’accumuler aux derniers rangs des masses incapables de se suffire à elles-mêmes. Ces masses restent privées du bien-être et de la sécurité qui, sous les régimes de l’Orient, sont garantis par l’abondance du sol inculte et par la conservation des régimes de contrainte. L’état de souffrance qui résulte de l’ensemble de ces causes est habituellement aggravé, pour la majorité des populations ouvrières, par trois circonstances principales. En premier lieu, la multiplicité des moyens de production provoque entre les ateliers de travail une concurrence exagérée : elle fait naître des alternances d’activité fiévreuse ou de chômage forcé ; et, ainsi, elle expose successivement les ouvriers au double danger d’une abondance corruptrice et d’un pénible dénûment[1]. En second lieu, même aux époques d’activité commerciale, les ouvriers, arrachés brusquement aux salutaires influences de la vie rurale et agglomérés au contact des corruptions urbaines, subissent tous les maux qu’engendre la réunion

  1. Les Ouvriers européens, XVI, XXII, XXIII, XXIV.