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7. Opinion de Benjamin Constant.

« Ce n’était pas, dans notre ancien régime, la volonté des pères qui avait établi le droit d’aînesse ; c’était, au contraire, le droit d’aînesse qui dénaturait la volonté des pères… Si, sous le prétexte d’opposer aux priviléges une digue insurmontable, vous refusez aux pères la liberté légitime de récompenser la piété et de punir la désobéissance filiale, les pères peu éclairés, qui sentiront que vous commettez une injustice en leur enlevant cette liberté, croiront, sur votre parole, qu’ils ne peuvent la ressaisir que par le retour des privilèges. Vous leur en auriez inspiré l’horreur, si vos lois sages avaient distingué soigneusement des objets complètement séparés ; mais vous leur en faites souhaiter le retour par des lois vexatoires et de confuses interdictions.

« C’est donc par haine pour la féodalité que je vous demande de restituer aux pères leurs droits et leur liberté légitime. Je ne veux pas que, se trouvant privés de l’empire que la nature leur a délégué, se voyant déchus d’une puissance dont la perte est pour eux et pour leurs enfants le plus grand des maux, ils en accusent l’égalité nouvellement introduite. Je ne veux pas que dédaignés par leurs fils ingrats, abandonnés dans leurs derniers jours, descendant vers la tombe dans l’humiliation et la solitude, ils accusent la révolution de leur douleur paternelle, la plus amère des douleurs.

« Il est d’autres précautions à prendre contre le retour des privilèges. Proscrivez les substitutions,