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on l’a dit, un moyen entièrement pénal, mais aussi un moyen de récompense. Il place les enfants entre l’espérance et la crainte, c’est-à-dire entre les sentiments par lesquels on conduit les hommes bien plus sûrement que par des raisonnements métaphysiques. Le droit de disposer est encore un droit d’arbitrage par lequel le père répartit son bien entre ses enfants, proportionnellement à leurs besoins. Et il faut remarquer que ce droit est avantageux à la société ; car le père, en donnant moins aux enfants engagés dans une profession lucrative, réserve une plus forte part à ceux que leurs talents appellent à des fonctions utiles à l’État, inutiles à leur fortune.

« Là où le père est législateur dans sa famille, la société se trouve déchargée d’une partie de sa sollicitude. Qu’on ne dise pas que c’est là un droit aristocratique. Il est tellement fondé sur la raison, que c’est dans les classes inférieures que le pouvoir du père est le plus nécessaire. Un laboureur, par exemple, a eu d’abord un fils, qui, se trouvant le premier élevé, est devenu le compagnon de ses travaux. Les enfants nés depuis, étant moins nécessaires au père, se sont répandus dans les villes et y ont poussé leur fortune. Lorsque ce père mourra, sera-t-il juste que l’aîné partage également le champ amélioré par ses labeurs avec des frères qui déjà sont plus riches que lui ? »

(Discussion du Code Napoléon dans le conseil d’État, par Jouanneau et Solon ; 2e édit., 3 vol. in-4o ; t. II, p. 126.) — Comparer avec l’opinion qui règne en Savoie, depuis l’annexion (H).