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menses quantités de produits fournis par les mines et les manufactures du monde entier.

La raison et l’expérience du genre humain établissent donc que la prospérité de chaque peuple croît avec la force morale qui crée les habitudes d’épargne et les accumulations de richesse.

Et cependant, depuis que la liberté de réunion nous est rendue, nous entendons professer journellement dans les assemblées populaires de Paris des doctrines qui tendent à perpétuer, par la communauté des sentiments dérivant de la misère, une caste fermée, hostile à tout ordre social. Ces doctrines se résument dans les axiomes suivants : « Le capital, c’est la honte accumulée. — La propriété n’est pas seulement le vol, c’est aussi l’assassinat. — L’ouvrier qui épargne est traître envers ses frères. » (Assemblée dite la Redoute ; réunions d’octobre et de novembre 1868.)

Or les voyageurs qui ont vécu longtemps parmi les sauvages du bassin de l’Amazone, m’assurent que ces derniers n’érigent nullement leur pratique en théorie ; que, tout en cédant à leur imprévoyante gloutonnerie et en se gorgeant des produits d’une chasse surabondante, ils rendent hommage à la supériorité morale des peuples sédentaires du voisinage, qui les assistent, à l’aide de leur épargne, aux époques d’extrême dénûment. Il existe donc, en France, une classe d’hommes déjà nombreuse qui, par certaines idées, sinon par ses mœurs, descendent au-dessous des races les plus dégradées.

Ces doctrines se sont élaborées, à notre insu, sous